Si vous ne mangez pas ma chair...

Pourquoi Jean prête-t-il à Jésus des paroles aussi provocantes ? Parce que enfin, ça revient à dire : "Si vous ne devenez pas anthropophages, vous n’aurez pas la vie en vous." Si Jésus ne les a pas réellement prononcées (et beaucoup d’exégètes sont d’accord pour penser que Jean a forcé les propos de Jésus) il a dû dire des paroles qui s’en rapprochent. Et beaucoup d’auditeurs ont été découragés et sont partis.

D’accord, après le Jeudi saint, ça s’est éclairci et sous forme de pain et de vin, ça devenait mangeable et buvable. Mais, au moment où il l’a dit... je serais partie, c’est sûr. Ce qu’il proposait était inacceptable.

Pourquoi n’a-t-il pas donné d’explication la première fois où il en a parlé ? C’est de la provocation pure et simple. Pourquoi heurter violemment des gens qui se sentaient attirés par lui, mais qui demandaient à voir, avant de s’engager à fond ?

Ça m’a fait penser à ces gosses de la DASS qui souffrent tellement de ne pas avoir de famille qu’ils se jettent littéralement sur la première personne qui leur manifeste un peu d’intérêt. Il l’appelle papa ou maman suivant le sexe, au bout d’une demi-heure et ensuite n’arrête pas de l’égratigner au propre et au figuré, de la blesser même pour mesurer quel est le degré d’amour de cette personne pour lui, le petit qu’on n’a jamais aimé ; il provoque, parce qu’il veut à tout prix savoir s’il peut vraiment faire confiance.

Confiance, et voilà le mot sur lequel Dieu ne badine pas.

Confiance, il faut lui faire confiance, comme font les petits enfants avec ceux qui les aiment. Brave Pierre, qui, une fois de plus s’est jeté à l’eau, bien qu’il ait été lui aussi interloqué, ça se sent dans sa réponse, quand Jésus demande aux apôtres : « Vous aussi, vous allez me quitter ? » « A qui irions-nous Seigneur, tu as les paroles de la vie éternelle. »

Seigneur, pourquoi je me méfie de toi ? C’est enraciné en moi. Mais aussi, tu as la réputation de demander tout le bras quand on t’offre le petit doigt ; alors, je me tiens sur mes gardes. Ce qui est malheureux car ça ne favorise pas la communication ni l’échange et torpille l’intimité, l’amitié.

Mais il paraît qu’avec la vieillesse on redevient enfant ; alors, tous les espoirs me sont permis, n’est-ce pas, Seigneur ?

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Françoise REYNÈS

Laïque mariste († 2011).

Publié: 29/03/2003