Le départ de Jésus et la venue du Saint-Esprit
Vous avez déjà vu des gosses qui jouent à califourchon sur une poutre : quand l’un monte, l’autre descend. Ils ne sont jamais au même niveau, sauf lorsqu’ils arrêtent de se balancer et se trouvent en équilibre instable sur la poutre, à l’horizontale.
Pourquoi ce jeu me faisait-il penser aux paroles de Jésus qui annonce sa montée auprès de son Père et la descente du Saint-Esprit. Y avait-il une raison pour que Jésus et le Saint-Esprit respectent cette règle du protocole royal d’Angleterre qui veut que, lorsque le roi ou la reine en exercice quitte la perfide Albion, son rejeton, en l’occurrence le prince de Galles, soit obligé de rester à la maison.
Les Anglais ne veulent pas prendre le risque, en cas d’attentat, de perdre à la fois le monarque en exercice et son successeur attitré. Ils se gardent une poire pour la soif, n’est-ce pas Votre Majesté ?
Bien, mais revenons au texte de saint Jean.
Je vous l’ai déjà dit, quand on prend les termes des évangiles au premier degré, on finit par déraisonner complètement.
Mais pourquoi était-il bon que Jésus quitte ses apôtres ? Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’au moment du départ, ils n’étaient pas au point, leur formation était très incomplète.
Mais en y réfléchissant (je n’ose pas dire en méditant), cela se comprend parfaitement : il suffit de se reporter à sa propre éducation.
Il a été utile, et même absolument indispensable, qu’à un moment donné, je quitte mes parents, pour acquérir ma véritable personnalité ; il faut une certaine distance, un certain recul pour achever sa croissance.
C’est vrai avec les parents, c’est vrai avec n’importe quel formateur : ceux qui refusent cette évolution restent des fils à papa et ce n’est pas un compliment. Il faut savoir sortir du giron des parents, il faut casser le cordon ombilical. Et pas question de retourner dans le ventre de sa mère, n’est-ce pas Nicodème ?
Il en a été de même pour les apôtres ; il a été bon pour eux, il a été nécessaire que Jésus, en chair et en os, les quitte pour qu’ils ne se contentent plus de suivre leur maître et tuteur, de reproduire ses gestes, de redire ses paroles. Il a fallu qu’ils cherchent à comprendre ce qu’il avait dit et qu’ils n’avaient pas assimilé au moment où il l’avait dit. Les évangiles fourmillent de ces exemples où on voit les apôtres embarrassés, complètement dépassés par ce que Jésus dit ou fait : ils avaient besoin d’une certaine distance, d’un certain temps de réflexion. Et c’est là qu’intervient l’Esprit Saint. C’est sous son impulsion que ce travail d’approfondissement peut se faire avec fruit ; et lui peut intervenir auprès de chacun d’entre nous à n’importe quelle époque.
Jésus, en tant qu’homme, était forcément limité. S’il n’était pas mort à trente ans sur une croix, il serait forcément mort à soixante-dix ou quatre-vingt-dix ans. Et même de son vivant, seule une petite poignée de Juifs a pu le voir, l’entendre le toucher ; comment assurer le salut universel dans ces conditions ? Il était nécessaire que Jésus en tant qu’homme disparaisse, et que son Esprit, l’Esprit Saint, vienne nous visiter. Et il est indispensable de se mettre à son écoute, sinon vous avez vu les élucubrations auxquelles on peut arriver.
Finalement, Dieu fait bien ce qu’il fait ; pourquoi faut-il qu’a priori j’en doute ? J’ai toujours peur d’être embobinée, victime d’un bourrage de crâne.
Mais peut-être que comme ça, ça permet de chercher, d’interroger les autres et peut-être ainsi d’avancer ?
Ça doit être ça. Merci mon Dieu.
Laïque mariste († 2011).
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