L’enfant Jésus jouant avec un clou
Le Bernin
Gian Lorenzo Bernini (1598-1680), assisté de son fils Paolo Valentino. 1665. Marbre, 60 x 80 cm. Paris, musée du Louvre.
L’œuvre est déroutante et peut même nous rebuter. Associer la douceur de l’enfance de Jésus à la douleur de sa Passion, ne serait-ce pas la marque d’un dolorisme exagéré ?
Nous voyons l’œuvre depuis notre XXIe siècle. Nous considérons l’enfance comme une période décisive pour la construction de la personne. Le petit enfant éveille en nous la tendresse. Au XVIIe siècle, l’enfance était regardée comme un état humiliant au regard de la grandeur humaine.
Aussi, contempler l’enfance du Christ, c’était d’abord contempler son abaissement dans l’Incarnation… « Il s’est abaissé lui-même » (), prélude de son abaissement dans la Passion. L’Ecole française de spiritualité développa beaucoup ce thème.
Lier l’enfance du Christ et sa Passion, c’est regarder deux aspects d’un même mystère : l’Incarnation du Christ, sa vie terrestre comme l’unique don de lui-même pour sauver l’humanité.
L’enfant représenté est un bébé qui ne marche pas encore mais se déplace déjà. Potelé, les cheveux frisés, il a la douceur de l’enfance, pourtant troublée par la tristesse de son regard, bien au-dessus de son âge.
L’enfant s’est aventuré jusqu’à la boîte à outils de son père dont émerge un marteau. Il a saisi un clou dont la pointe perce la paume de sa main. Un tissu, dont l’artiste assure qu’il s’agit d’un voile de sa mère, déploie généreusement ses plis, préservant comme par hasard la pudeur de l’enfant.
La douleur ressentie ou le sentiment d’interdit éprouvé en jouant avec les affaires de ses parents ne suffit pas à expliquer la tristesse de l’enfant.
En effet, la boîte à outils, posée sur un sol rocheux, ressemble à un tombeau ; et le voile de Marie, à un linceul déjà préparé. Quant au marteau et au clou démesuré, ils préfigurent la crucifixion de façon saisissante.
Notre regard sur l’enfance a bien changé depuis 350 ans. Mais l’œuvre, toujours provocante, conserve sa pertinence : Noël n’est pas le temps de s’attendrir sur la douceur de l’enfant tandis que la Semaine Sainte serait celui de compatir à la douleur de l’homme maltraité. De la crèche à la croix, le Fils de Dieu, abaissé en notre humanité, à travers ses joies, ses peines, ses souffrances, sa mission, son message, accueilli ou refusé, nous conduit à la Résurrection.
Prêtre du diocèse de Cambrai, responsable de la Commission d’art sacré.
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