L’arbre à soucis

Un jour, j’ai retenu les services d’un menuisier pour m’aider à restaurer ma vieille grange. Après avoir terminé une dure journée au cours de laquelle une crevaison lui avait fait perdre une heure de travail, sa scie électrique avait rendu l’âme, et pour finir, au moment de rentrer chez lui, son vieux fourgon refusait de démarrer.

Je le reconduisis chez lui et il demeura froid et silencieux tout au long du trajet. En arrivant, il m’invita à rencontrer sa famille. Comme nous marchions le long de l’allée qui conduisait à la maison, il s’arrêta brièvement à un arbre, en touchant le bout des branches. Lorsqu’il ouvrit la porte d’entrée, une étonnante transformation se produisit. Son visage devint rayonnant, il caressa ses deux enfants et embrassa sa femme. Il me raccompagna à ma voiture, en passant près de l’arbre. La curiosité s’empara de moi et je lui demandai pourquoi il en avait touché les branches, un peu plus tôt.

« C’est mon arbre à soucis », me répondit-il. « Je sais que je ne peux éviter les problèmes, les soucis et les embûches qui traversent mes journées, mais il y a une chose dont je suis certain : ceux-ci n’ont aucune place dans la maison avec ma femme et mes enfants. Alors, je les accroche à mon arbre à soucis tous les soirs lorsque je rentre à la maison. Et puis, je les reprends le matin. » Ce qu’il y a de plus drôle », sourit-il, « c’est que lorsque je sors de la maison le matin pour les reprendre, il y en a beaucoup moins que la veille lorsque je les avais accrochés ».

Cette histoire transmise, il y a quelques années, par une lectrice mérite notre attention. Qui d’entre nous n’a aucun souci ? C’est quotidiennement que, pour diverses raisons, nous avons de quoi nous tracasser. Comme pour nous empêcher de vivre et d’être pleinement heureux.

Et si l’on prenait le temps de hiérarchiser ses soucis, histoire de ne pas transformer en montagne ce qui n’est bien souvent qu’une taupinière ? Et, plus profondément, si l’on décidait de vivre la confiance ? Confiance en soi, pour certains... Pour d’autres, confiance en Dieu : « Jette ton fardeau, mets le sur le Seigneur, il te réconfortera » nous dit le psalmiste.

En botanique, le souci est une fleur qui se ferme la nuit venue et qui s’ouvre au contact du soleil. Bel enseignement pour nous qui passons de la nuit à la lumière. Peut-être pourrions-nous semer quelques graines de soucis... plus commode que de planter un arbre !

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Michel AMALRIC

Prêtre du diocèse d’Albi, chargé de la communication.

Publié: 01/07/2017