Oser dire « non »

Je ne sais pas dire « non »… Je n’arrive pas à dire « non ».
Que de fois avons-nous entendu ces expressions ou les avons-nous utilisées nous-mêmes ! Serait-ce que nous avons été éduqués à dire « oui » ? La tradition chrétienne, depuis les nombreux « oui » de la Bible, ceux de l’appel à la vocation prophétique, comme le « oui » de Marie, à l’Annonciation, nous façonnerait-elle encore maintenant au seul acquiescement ?

Peut-être croyons-nous que dire « oui » c’est plus facile, moins risqué. Ce serait plus gratifiant car on s’imagine faire plaisir à l’autre. En réalité, c’est la pente agréable pour cultiver sa propre satisfaction et bichonner son Moi. C’est aussi un désir inavoué de faire comme tout le monde et surtout de vouloir rester dans la norme du groupe. Le « parler correct » dans le monde d’aujourd’hui ainsi que dans l’Église, d’ailleurs, supplante souvent le « parler vrai ». Dire toujours « oui », c’est peut-être bien vouloir être aimé de tout le monde à tout prix. Pure illusion, en fait. Être aimé de tous, c’est n’être aimé de personne, c’est perdre sa personnalité. Très certainement la peur de dire « non » vient de la peur de couper les relations. On veut tellement vivre la fusion que le « oui » semble plus rassurant, même s’il nous laisse dans l’illusion ! Comme si on pouvait être en harmonie avec tout le monde !

Mais si l’on choisit d’être fidèle à soi, dire « non » c’est dire qui on est et ce que l’on croit. C’est prendre une saine distance pour ne pas se satisfaire d’être de l’avis du dernier qui a parlé, au risque d’être qualifié de « girouette ». À ces conditions-là peut s’instaurer alors une relation dans un climat d’authenticité qui nous délivre des faux-semblants et des fausses relations forcément éphémères. L’échange et le débat font la richesse de la confrontation. Ils sont le lieu privilégié pour mesurer nos propres capacités, prendre acte de nos propres convictions et apprivoiser nos faiblesses. De cette confrontation peut naître une meilleure rencontre avec soi et avec notre interlocuteur.

Certes c’est un chemin exigeant. Il prend en compte la différence et conduit à « faire la vérité ». Si, au début de cette réflexion j’évoquais les « oui » de l’Évangile, j’aime autant la rencontre de Jésus avec un homme invité à tout laisser pour le suivre. Il « s’en alla tout triste car il avait de grands biens ». Il a su et il a pu dire « non ». Je vois là le signe de la liberté que suscite Jésus en chacun de ses interlocuteurs. Il n’est pas un gourou manipulateur qui ferait pression pour qu’on le suive. Face à son message, il laisse à chacun la possibilité de dire « oui » ou « non » !

Dans le quotidien de nos rencontres, sommes-nous prêts à entendre quelqu’un nous dire « non » ? Sommes-nous suffisamment assurés en nous-mêmes pour oser dire « non » à notre tour ?

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Michel AMALRIC

Prêtre du diocèse d’Albi, chargé de la communication.

Publié: 01/12/2017