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Numéro(s) recherché(s): Lumen Gentium 1-8

Lumen Gentium1Introduction

Le Christ est la Lumière des nations; aussi, en annonçant l'Evangile à toute créature (cf. Mc 16, 15), le saint Concile réuni dans l'Esprit-Saint désire-t-il ardemment illuminer tous les hommes de la lumière du Christ qui resplendit sur le visage de l'Eglise. Celle-ci, pour sa part, est dans le Christ comme un sacrement ou, si l'on veut, un signe et un moyen d'opérer l'union intime avec Dieu et l'unité de tout le genre humain; elle se propose donc, en suivant de près la doctrine des précédents Conciles, de faire connaître avec plus de précision à ses fidèles et au monde entier sa nature et sa mission universelle. Ce devoir, les conditions actuelles l'imposent à l'Eglise avec une urgence accrue: il importe en effet que la communauté humaine, toujours plus étroitement unifiée par de multiples liens sociaux, techniques, culturels, puisse atteindre également sa pleine unité dans le Christ.
Lumen Gentium2Le dessein du Père qui veut sauver tous les hommes
Par une disposition tout à fait libre et mystérieuse de sa sagesse et de sa bonté, le Père éternel a créé l'univers. Il a voulu élever les hommes jusqu'au partage de la vie divine. Et une fois qu'ils eurent péché en Adam, il ne les abandonna pas; sans cesse il leur offrit des secours pour leur salut en considération du Christ rédempteur, "qui est l'image du Dieu invisible, le premier-né de toute créature" (Col. 1, 15). D'autre part, ceux qu'il a choisis, le Père avant tous les siècles les "a d'avance connus et prédestinés à reproduire l'image de son Fils, pour que celui-ci soit le premier-né d'un grand nombre de frères" (Rom. 8, 29). Et ceux qui ont foi dans le Christ, il a voulu les rassembler en la sainte Eglise qui, préfigurée dès l'origine du monde, admirablement préparée dans l'histoire du peuple d'Israël et l'ancienne Alliance (1), établie en ces temps qui sont les derniers, a été manifestée par l'effusion de l'Esprit et sera glorieusement achevée à la fin des siècles. Alors seulement, comme on peut le lire dans les saints Pères, tous les justes depuis Adam, "depuis le juste Abel jusqu'au dernier élu" (2) seront rassemblés auprès du Père dans l'Eglise universelle.
(1) Cf. S. Cyprianus, Epist. 64, 4: PL 3, 1017. CSEL (Hartel), III B, p. 720. S. Hilarius Pict., In Mt. 23, 6: PL 9, 1047. S. Augustinus, passim. S. Cyrillus Alex., Glaph. in Gen. 2, 10: PG 69, 110 A
(2) Cf. S. Gregorius M., Hom. in Evang. 19, 1: PL 76, 1154 B. S. Augustinus, Serm. 341, 9, 11: PL 39, 1499 s. S. Io. Damascenus. Adv. Iconocl. Il: PG 96, 1357.
Lumen Gentium3La mission du Fils

Le Fils est donc venu, envoyé par le Père qui nous a choisis en lui dès avant la création du monde et nous a prédestinés à être ses enfants adoptifs, parce qu'il lui a plu de tout réunir en lui (cf. Eph. 1, 4-5 et 10). C'est pourquoi le Christ, afin d'accomplir la volonté du Père, a inauguré ici-bas le royaume des cieux, nous a révélé le mystère du Père et, par son obéissance, a opéré la rédemption. L'Église, qui est 1e royaume du Christ déjà présent sous une forme mystérieuse, croît visiblement dans le monde grâce à la puissance de Dieu. Ce commencement et cette croissance sont signifiés par le sang et l'eau qui sortent du côté de Jésus crucifié (cf. Jn 19, 34) et annoncés par les paroles du Seigneur concernant sa mort en croix: "Et Moi, quand je serai élevé de terre, j'attirerai tout à Moi" (Jn 12, 32 gr.). Chaque fois que le sacrifice de la croix, par lequel "le Christ, notre Pâque, a été immolé" (I Cor. 5, 7), est célébré sur l'autel, l'oeuvre de notre rédemption se réalise. En même temps le sacrement du pain eucharistique représente et produit l'unité des fidèles, qui constituent un seul corps dans le Christ (cf. I Cor. 10, 17). Tous les hommes sont appelés à cette union avec le Christ, qui est la lumière du monde, de qui nous venons, par qui nous vivons, vers qui nous tendons.
Lumen Gentium4L'Esprit qui sanctifie l'Eglise

Une fois accomplie l'oeuvre que le Père avait donné à faire au Fils sur la terre (cf. Jn 17, 4), l'Esprit-Saint fut envoyé le jour de la Pentecôte, afin de sanctifier l'Eglise en permanence et qu'ainsi les croyants aient par le Christ, en un seul Esprit, accès auprès du Père (cf. Eph. 2, 18). Il est l'Esprit de vie, la source d'eau jaillissant jusqu'à la vie éternelle (cf. Jn 4, 14; 7, 38-39), par qui le Père vivifie les hommes, morts par suite du péché, jusqu'au moment où il rendra la vie dans 1e Christ à leurs corps mortels (cf. Rom. 8, 10-I1). L'Esprit habite dans l'Eglise et dans les coeurs des fidèles comme en un temple (cf. I Cor. 3, 16; 6, 19); en eux il prie et rend témoignage de leur adoption filiale (cf. Gal. 4, 6; Rom. 8, 15-16 et 26). Cette Eglise qu'il amène à la vérité tout entière (cf. Jn 16, 13), qu'il réunit dans la communion et le ministère, il l'édifie encore et la dirige par des dons variés, tant hiérarchiques que charismatiques, et par ses oeuvres il l'embellit (cf. Eph. 4, 11-12; I Cor. 12, 4; Gal. 5, 22). Il la rajeunit par la force de l'Evangile, il la rénove perpétuellement et la conduit enfin à l'union parfaite avec son Epoux (1). Car l'Esprit et l'Epouse disent au Seigneur Jésus "Viens!" (cf. Apoc. 22, 17). Ainsi l'Eglise universelle apparaît-elle comme "un peuple rassemblé dans l'unité du Père, du Fils et de l'Esprit-Saint" (2).
(1) Cf. S. Irenaeus, Adv. Haer. III, 24, 1: PG 7, 966 B; Harvey 2. 131; ed. Sagnard, Sources Chr., p. 398
(2) S. Cyprianus, De Orat. Dom. 23: PL 4, 553; Hartel, III A, p. 285. S. Augustinus, Seren. 71, 20, 33: PL 38, 463 s. S. Io. Damascenus,.4dv. Iconocl. 12: PG 96. 1358 D.
Lumen Gentium5Le royaume de Dieu

Le mystère de la sainte Eglise se manifeste dans sa fondation. Le Seigneur Jésus, en effet, inaugura son Eglise en prêchant la bonne nouvelle, c'est-à-dire la venue du Royaume de Dieu promis depuis des siècles dans les Écritures: "Les temps sont accomplis, le Royaume de Dieu est proche" (Me 1, 15; cf. Mt. 4, 17). Ce Royaume de Dieu, il apparaît aux hommes dans la parole, les oeuvres et la présence du Christ. La parole du Seigneur est comparée au grain semé dans un champ (Mc 4, 14): ceux qui l'écoutent avec foi et s'agrègent au petit troupeau du Christ (Lc 12, 32) ont accueilli le Royaume lui-même. Puis la semence, par sa propre force, germe et se développe jusqu'au temps de la moisson (cf. Mc 4, 26-29). De même les miracles de Jésus sont une preuve que le Royaume est véritablement venu sur terre: "Si c'est par le doigt de Dieu que je chasse les démons, il est déjà venu à vous, le Royaume de Dieu" (Lc 11, 20; cf. Mt. 12, 28). Mais, avant tout, le Royaume se manifeste dans la Personne même du Christ, Fils de Dieu et Fils de l'homme, qui est venu "pour servir et donner sa vie comme rançon d'un grand nombre" (Mc 10. 45).

Et quand Jésus, après avoir souffert la mort en croix pour les hommes, fut ressuscité, il apparut établi comme Seigneur et Christ, comme Prêtre éternel (cf. Act. 2, 36; Héb. 5, 6; 7, 17-21) et il répandit en ses disciples l'Esprit promis par le Père (cf. Act. 2, 33). Dès lors, l'Eglise pourvue des dons de son Fondateur et attachée à ses préceptes de charité, d'humilité et d'abnégation, reçoit la mission d'annoncer et d'instaurer en toutes les nations le Royaume du Christ et de Dieu dont, sur terre, elle constitue le germe et le commencement. Dans l'intervalle, à mesure qu'elle grandit, elle aspire à l'accomplissement du Royaume, elle espère et souhaite de toutes ses forces être unie à son Roi dans la gloire.
Lumen Gentium6Les images de l'Eglise

Dans l'Ancien Testament la révélation du Royaume est souvent présentée sous des figures; de même maintenant, c'est par diverses images que la nature intime de l'Eglise se fait connaître à nous, et ces images empruntées soit à la vie pastorale et au travail des champs, soit à la construction des édifices et même à la famille et aux noces, s'élaborent déjà dans les livres des Prophètes.

L'Eglise est en effet le bercail dont la porte unique et nécessaire est le Christ (Jn 10, 1-10). Elle est aussi le troupeau, dont Dieu avait annoncé qu'il serait lui-même le pasteur (cf. Is. 40, 11; Ez. 34. 11 suiv.), et dont les brebis, même si elles sont guidées par des pasteurs humains, ne cessent jamais cependant d'être conduites et nourries par le Christ lui-même, le bon Pasteur et le Prince des pasteurs (cf. Jn 10, 11; I Petr. 5, 4), qui a donné sa vie pour les brebis (cf. Jn 10, 11-15).

L'Eglise est la terre que Dieu cultive, ou encore son champ (I Cor. 3, 9). Dans ce champ grandit l'antique olivier dont la racine sainte fut constituée par les Patriarches et dans lequel s'est faite et se fera la réconciliation des Juifs et des Gentils (Rom. 11, 13-26). L'Eglise a été plantée par le céleste Cultivateur comme la vigne choisie (Mt. 21, 33-43 par.; cf. Is. 5, 1 suiv.). Le Christ est la vraie vigne qui donne la vie et la fécondité aux sarments, c'est-à-dire à nous qui par l'Eglise demeurons en lui; et sans lui nous ne pouvons rien faire (Jn 15.1-5).

Plus souvent encore l'Eglise s'appelle l'édifice de Dieu (I Cor. 3, 9). Le Seigneur lui-même s'est comparé à la pierre que les bâtisseurs ont rejetée mais qui est devenue tête d'angle (Mt. 21, 41 par.; cf. Act. 4, 11; I Petr. 2, 7; Ps. 117, 22). Sur ce fondement l'Eglise est construite par les apôtres (cf. I Cor. 3, 11) et c'est de lui qu'elle reçoit fermeté et cohésion. Cet édifice prend diverses appellations: maison de Dieu (I Tim. 3, 15) où habite sa famille, demeure de Dieu dans l'Esprit (Eph. 2. 19-22), "tabernacle de Dieu avec les hommes" (Apoc. 21, 3) et surtout temple sacré, que les saints Pères voient représenté dans des sanctuaires de pierres et qui, dans la Liturgie, est comparé non sans raison à la Cité sainte, à la nouvelle Jérusalem (1). En elle, de fait, nous sommes édifiés dès ici-bas comme des pierres vivantes (cf. I Petr. 2, 5). Et Jean contemple la sainte cité, lors de la rénovation du monde, descendant du ciel d'auprès de Dieu, "prête comme une fiancée toute parée pour son époux" (Apoc. 21, 1 suiv.).

L'Eglise est même appelée "la Jérusalem d'en haut" et "notre mère" (Gal. 4, 26: Apoc. 12, 17); elle apparaît comme l'épouse immaculée de l'Agneau sans tache (Apoc. 19, 7; 21, 2 et 9; 22, 17). Cette épouse, le Christ "l'a aimée... et il s'est livré lui-même pour elle, afin de la sanctifier" (Eph. 5, 25-26); il se l'est associée par un pacte indissoluble et sans cesse "il la nourrit et la soigne" (Eph. 5, 29), et il a voulu, après l'avoir purifiée, qu'elle lui soit unie et soumise dans l'amour et la fidélité (cf. Eph. 5, 24). Enfin, il l'a comblée pour toujours de dons célestes, afin que nous puissions connaître la charité de Dieu et du Christ pour nous, charité qui dépasse tonte connaissance (cf. Eph. 3, 19). Mais tandis que l'Eglise accomplit son pèlerinage sur terre, loin du Seigneur (cf. II Cor. 5, 6), elle se sent comme en exil, si bien qu'elle recherche les choses d'en haut, qu'elle a du goût pour les choses d'en haut, là où le Christ est assis à la droite de Dieu, où sa vie reste cachée avec le Christ en Dieu jusqu'au jour où elle apparaîtra avec son Epoux dans la gloire (cf. Col. 3, 1-4).
(1) Cf. Origenes, In Matth. 16, 21: PG 13, 1443 C; Tertullianus, Adv. Marc. 3, 7: PL 2, 357 C; CSEL 47, 3 p. 386. Pour les documents liturgiques, cf. Sacramentarium Gregorianum: PL 78, 160 B. Ou C. Mohlberg, Liber Sacramentorum Romanae Ecclesiae, Romae 1960, p. 111, XC: "Deus, qui ex omni coaptatione sanctorum acternum tibi condis habitaculum...". Hymnes Urbs Jerusalem beata dans le Bréviaire monastique et Coelestis urbs Jerusalem dans le Bréviaire Romain.
Lumen Gentium7L'Eglise, Corps mystique du Christ

Dans la nature humaine qu'il s'est unie, le Fils de Dieu, en remportant la victoire sur la mort par sa mort et sa résurrection, a racheté l'homme et l'a transformé pour en faire une nouvelle créature (cf. Gal. 6, 15; II Cor. 5, 17). Car en communiquant son Esprit, il a mystiquement établi ses frères, appelés d'entre toutes les nations, comme son propre corps.

Dans ce corps la vie du Christ se diffuse en ceux qui croient et qui, par les sacrements, sont unis, d'une façon mystérieuse mais bien réelle, au Christ souffrant et glorifié (1). Par le baptême, en effet, nous sommes rendus conformes au Christ: "En effet, nous avons été baptisés dans un seul Esprit pour former un seul corps" (I Cor. 12, 13). Par ce rite sacré, l'union à la mort et à la résurrection du Christ est à la fois représentée et effectuée: "par le baptême, en effet, nous avons été ensevelis avec lui dans la mort"; et si "nous avons été greffés sur lui par une mort pareille à la sienne, de même le serons-nous par une résurrection pareille" (Rom. 6, 4-5). Dans la fraction du pain eucharistique nous avons réellement part au corps du Seigneur et nous sommes élevés à la communion avec lui et entre nous. "Parce qu'il y a un seul pain, nous ne sommes qu'un corps malgré notre grand nombre, attendu que tous nous recevons notre part de ce pain unique" (I Cor. 10, 17). Ainsi tous nous devenons membres de ce corps (cf. I Cor. 12, 27) "et respectivement, membres 1es uns des autres" (Rom. 12, 5).

Mais de même que tous les membres du corps humain, pour nombreux qu'ils soient, ne forment cependant qu'un corps, de même en est-il des fidèles dans le Christ (cf. I Cor. 12, 12). La diversité des membres et des fonctions se vérifie également dans l'édification du corps du Christ. Unique est l'Esprit, qui distribue ses dons, à la mesure de sa richesse et suivant les besoins des ministères, au profit de l'Eglise (cf. I Cor. 12, 1-11). Parmi ces dons vient en tête la grâce des apôtres, à l'autorité desquels l'Esprit lui-même soumet ceux qui ont reçu des charismes (cf. I Cor. 14). C'est le même Esprit qui unifie lui-même le corps par sa propre puissance et au moyen de l'articulation interne des membres entre eux, et qui produit et stimule la charité chez les fidèles. En conséquence, si un membre a quelque souffrance à supporter, tous les membres souffrent avec lui; ou si an membre est honoré, tous les membres partagent sa joie (cf. I Cor. 12, 26).

De ce corps le Christ est le chef. Il est lui-même l'image du Dieu invisible, et en lui tout a été créé. Lui-même est avant toute chose et toutes choses subsistent en lui. Il est le chef du corps qu'est l'Eglise. Il est le principe, le premier-né d'entre les morts, afin d'avoir en tout la prééminence (cf. Col. 1, 15418). Par la grandeur de sa puissance il règne sur les choses du ciel et de la terre; grâce à sa perfection et à son action qui surpassent tout, il comble des richesses de sa gloire son corps tout entier (2) (cf. Eph. 1, 18-23).

Tous les membres doivent tendre à lui ressembler, jusqu'à ce que le Christ soit formé en eux (cf. Cal. 4, 19). Voilà pourquoi nous sommes englobés dans les mystères de sa propre vie, rendus conformes à lui-même, morts et ressuscités avec lui en attendant, de régner avec lui (cf. Phil. 3, 21; II Tim. 2, 11; Eph. 2, 6; Col. 2, 12; etc.). Cheminant encore sur la terre, suivant ses traces dans les épreuves et la persécution, nous sommes associés à ses souffrances comme le corps à sa tête, et nous souffrons avec lui pour être glorifiés avec lui (cf. Rom. 8, 17).

De lui "tout le corps, desservi et uni par des jointures et des liens, tire son accroissement en Dieu" (Col. 2, 19). Lui-même, dans son corps qui est l'Eglise, dispense sons cesse les dons des ministères, au moyen desquels nous nous aidons les uns les autres, grâce à lui, en vue du salut, afin que, professant la vérité dans la charité, nous croissions à tous les égards en lui qui est notre Chef (cf. Eph. 4, 11-16 gr.).

Et afin que nous soyons continuellement renouvelés en lui (cf. Eph. 4, 23), il nous a donné d'avoir part à son Esprit. Et cet Esprit, qui est unique et identique dans le Chef et dans les membres, vivifie, unifie et meut tout le corps; si bien que les saints Pères ont pu comparer son rôle à la fonction que l'âme, principe vital, remplit dans le corps humain (3).

Le Christ aime l'Eglise comme son épouse, et il est le modèle de l'homme qui aime sa femme comme son propre corps (cf. Eph. 5, 25-28); l'Eglise, pour sa part, est soumise à son Chef (ib. 23-24). "Parce qu'en lui corporellement réside la plénitude de la divinité" (Col. 2, 9), il comble de ses dons divins l'Eglise qui est son corps et son plérôme (cf. Eph. 1, 22-23), afin qu'elle tende et atteigne à toute la plénitude de Dieu (cf. Eph. 3, 19).
(1) Cf. s. Thomas, Summa Theol. III, q. 62, a. 5, ad 1.
(2) Cf. Pie XII, Litt. Encycl. Mystici Corporis, 29 juin 1943: AAS 35 (1943), p. 208.
(3) Cf. Leo XIII, Epist. Encycl. Divinum illud, 9 mai 1897: ASS 29 (1896-97) p. 650. Pie XII, Litt. Encycl. Mystici Corporis, 1. c., pp. 219-220; Denz. 2288 (3808). S. Augustinus, Serra. 268, 2: PL 38, 1232, et ailleurs. S. Io. Chrysostomus, In Eph. Hom. 9, 3: PG 62, 72. Didyrnus Alex., Trin. 2, 1: PG 39, 449 s. S. Thomas, In Col. 1, 18, lect. 5; ed. Marietti, II, n. 46: "Sicut constituitur unum corpus ex unitate animae, ita Ecclesia ex unitate Spiritus...".
Lumen Gentium8L'Eglise, à la lois visible et spirituelle

Le Christ, unique Médiateur, a établi et soutient sans cesse ici-bas sa sainte Eglise, qui est une communauté de foi, d'espérance et de charité, comme un organisme visible (1) par lequel il répand sur tous la vérité et la grâce. Mais la société constituée d'organes hiérarchiques et le Corps mystique du Christ, le groupement visible et la communauté spirituelle, l'Eglise terrestre et l'Eglise déjà pourvue des biens célestes ne doivent pas être considérés comme deux entités; ils constituent bien plutôt une seule réalité complexe formée d'un élément humain et d'un élément divin (2). Ainsi, par une analogie qui n'est pas sans valeur, elle est comparable au mystère du Verbe incarné. De même, en effet, que la nature assumée par le Verbe divin lui sert d'instrument de salut, instrument vivant et indissolublement uni à lui-même, de même cet organisme ecclésial sert à l'Esprit du Christ qui le vivifie en vue de la croissance du corps (cf. Eph. 4, 16) (3).

Telle est l'unique Eglise du Christ que, dans le Symbole, nous reconnaissons comme une, sainte, catholique et apostolique (4), que notre Sauveur, après sa résurrection remit à Pierre pour qu'il la paisse (Jn 21, 17). C'est elle que le même Pierre et les autres apôtres furent chargés par lui de répandre et de guider (cf. MI. 28, 18 ss), elle enfin qu'il établit pour toujours "colonne et soutien de la vérité" (I Tim. 3, 15). Cette Eglise, constituée et organisée en ce monde comme une communauté, subsiste dans l'Eglise catholique, gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques en communion avec lui (5), encore que, hors de cet ensemble, on trouve plusieurs éléments de sanctification et de vérité qui, en tant que dons propres à l'Eglise du Christ, invitent à l'unité catholique.

Le Christ a accompli son oeuvre rédemptrice dans la pauvreté et la persécution; ainsi l'Eglise est-elle appelée à prendre la même voie pour communiquer aux hommes les fruits du salut. Le Christ Jésus, "possédant la nature divine... s'est anéanti lui-même en prenant la nature de l'esclave" (Phil. 2, 6) et pour nous "s'est fait pauvre, de riche qu'il était" (II Cor. 8, 9). Telle est aussi l'Eglise; et même si elle a besoin de ressources humaines pour remplir sa mission, elle n'est pas établie pour rechercher la gloire terrestre, mais pour prêcher, même par son exemple, l'humilité et l'abnégation. Le Christ a été envoyé par le Père "pour évangéliser les pauvres... guérir les coeurs brisés" (Lc 4, 18), "chercher et sauver ce qui était perdu" (Lc 19, 10). De même l'Eglise entoure tous ceux qu'afflige l'infirmité humaine; bien plus, elle reconnaît dans les pauvres et en ceux qui souffrent l'image de son Fondateur pauvre et souffrant, elle s'emploie à soulager leur détresse et veut servir le Christ en eux. Mais tandis que le Christ "saint, innocent, sans souillure" (Hébr. 7, 26) n'a pas connu le péché (II Cor. 5, 21) mais est venu seulement expier les péchés du peuple (cf. Hébr. 2, 17), l'Eglise, qui renferme en son sein les pécheurs, qui est sainte et, en même temps, doit toujours être purifiée, recherche sans cesse ta pénitence et le renouvellement.

L'Eglise "va de l'avant, marchant parmi les persécutions du monde et les consolations de Dieu" (6), annonçant la croix et la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne (cf. I Cor. 11, 26). C'est la puissance du Seigneur ressuscité qui la fortifie pour lui faire surmonter par la patience et la charité ses peines et ses difficultés intérieures aussi bien qu'extérieures, et, malgré tout, lui faire révéler fidèlement au monde le mystère du Seigneur, mystère encore caché jusqu'à ce qu'il apparaisse à la fin dans sa pleine lumière.
(1) Leo XIII, Lift. Encycl. Sapientiae christianae, 10 janv. 1890: ASS 22 (1889-90) p. 392. Id., Epist. Encycl. Satis cognitum, 29 juin 1896: ASS 28 (1895-96) pp. 710 et 724 ss. Plus XII, Litt. Encycl. Mystici Corporis, I. c., pp. 199-200.
(2) Cf. Pius XII, Litt. Encycl. Mystici Corporis, 1. c.. p. 221 ss. Id., Litt. Encycl. Humani generis, 12 août 1950: AAS 42 (1950) p. 571.
(3) Leo XIII, Epist. Encycl. Satis Cognitum, 1. c., p. 713.
(4) Cf. Symbolum Apostolicum: Denz. 6-9 (10-13); Symb. Nic.-Const.: Denz. 86 (150); coll. Prof. fidei Trid.: Denz. 994 et 999 (1862 et 1868).
(5) On dit "Sancta (catholica apostolica) Romana Ecclesia": dans Prof. fidei Trid., 1. c., et dans Conc. Vat. I, Sess. III, Const. dogm. de fide cath.: Denz. 1782 (3001).
(6) S. Augustinus, Civ. Dei, XVIII, 51, 2: PL 41, 614.
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Publié: 30/11/1959