Toute révérence gardée

Quand nous avions entre 8 et 12 ans, mon frère, ma soeur et moi, nous lisions de temps en temps un vieux livre qui venait des arrières-arrières grands-parents de notre maman, livre qui faisait nos délices. C’était un recueil de lettres échangées entre un fils et son père. Ca devait se passer au 18e siècle, dans une famille de la grande bourgeoisie plutôt aisée. Le père était sévère, très moralisateur, et le fils nous paraissait craintif ridiculement obséquieux dans son désir de plaire à son père, avec un style ampoulé, d’où notre hilarité. Le moins qu’on puisse dire, c’est que ça manquait de chaleur, je n’ose pas dire d’amour mais si amour, il y avait, il était drôlement corseté.

J’ai pensé à ça l’autre jour à une réunion de famille, où se trouvaient plusieurs enfant et leurs parents ; il y avait trois générations.

Je me suis rendu compte que le style des échanges entre ces différentes générations avait fortement évolué. Entre mes neveux et moi, il n’y avait pas grande différence dans la façon dont ils conversaient avec leur mère. Mais ils étaient tout aussi décontractés quand ils s’adressaient à leur père, ce qui n’était pas mon cas, mon père était chef de famille et cela se sentait. Mais ce sont mes petits-neveux qui m’ont fortement étonnée. On aurait dit qu’il n’y avait plus aucune différence entre parents et enfants. Pour être vivant, le dialogue était vivant, ça pouvait même devenir violent quand ils s’adressaient réciproquement, sur un ton enjoué, de vifs reproches. Ils étaient sur un pied d’égalité... Ce qui était impensable à mon époque.

Comme on dit dans le midi, je me suis pensé que pour le jeune homme du 18e siècle, ma façon de converser avec Toi Seigneur, lui aurait sans nul doute paru totalement inconcevable, d’un irrespect total, alors que pour moi, elle traduit la confiance que j’ai pour un Père dont je sais qu’Il m’aime et qu’Il est miséricordieux.

Naturellement je me suis demandé si la génération de mes arrières petits neveux auraient vis à vis de Toi, la même désinvolture qu’avec leurs parents ?

Mais c’est un faux problème. Il suffit de lire la Bible ou la vie des Saints, pour se rendre compte, qu’à chaque époque, Tu as su et voulu, apparemment sans problème, T’adapter à notre évolution pour être proche de nous. Tu es vraiment un Papa, merveilleux Seigneur, toujours ouvert à nos façons de faire, toujours attentif à nos possibilités, ne demandant rien d’autre que ce que nous sommes capables de donner. Deo Gratias !

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Françoise REYNÈS

Laïque mariste († 2011).

Publié: 01/02/2012