Mes chers disciples d’Emmaüs ou la surprise de M. et Mme Cléophas

Dans , il est question des quelques femmes qui sont au pied de la croix, dont madame Cléophas, et dans Luc lorsqu’il raconte le passage des disciples d’Emmaüs (), il est question de Cléophas. J’ai donc fait le rapprochement et pour moi, ce sont monsieur et madame Cléophas qui rejoignent le domicile conjugal, après la crucifixion de leur Rabbi bien aimé.
Ça a pris la forme d’une saynète qui demande 3 intervenants avec en plus un lecteur et à la fin 11 figurants muets.
C’est très facilement jouable, peut-être même par des enfants qui ne seraient pas heurtés, je l’espère, par une petite altercation dans un couple ; ils doivent en avoir entendu d’autres chez eux...

M. et Mme Cléophas quittant Jérusalem retournaient chez eux à Emmaüs. Vu la trotte à faire, ils allaient d’un bon pas, d’autant que la nuit était proche. L’un et l’autre étaient anéantis. Mme Cléophas avait les yeux rouges. Elle avait pleuré. Ça se voyait.

« C’est quand même malheureux, dit madame Cléophas, vous les hommes, vous vous êtes conduits comme les derniers des derniers. Si vous vous étiez montrés sur la place avec Marie, si nous avions été plus nombreux à crier : JÉSUS quand le gouverneur romain voulait libérer un de nos prisonniers, ce n’est pas la clique du Grand Prêtre qui l’aurait emporté avec son BARABAS.
Mais non ! Vous étiez tous terrés, je ne sais où, trop contents de ne pas avoir été arrêtés avec notre Rabbi.
Vrai, vous devriez avoir honte !
Je te jure, on n’était pas nombreux au pied de la croix. »

Monsieur répliqua d’une voix indignée : « Tu en as de bonnes, toi ! Vous les femmes, vous ne risquiez rien, en vous montrant. Il ne viendrait à personne l’idée d’arrêter une femme pour un motif politique. Vous n’avez pas voix au chapitre.
Non, c’est notre Sanhédrin et tous nos Chefs qui sont coupables.
Et puis notre Rabbi aurait dû écouter Simon Pierre et ne pas s’entêter à aller à Jérusalem...
Mais maintenant c’est vrai, nous sommes bien malheureux pour ne pas dire désespérés.
Note que d’après Jean, qui m’a raconté ce qui s’était passé lors du dernier repas pascal, Rabbi Jésus avait l’air de se douter de ce qui allait arriver. À croire qu’Il l’avait voulu ! »

Madame : « Qu’Il le sache ou non ne fait rien à l’affaire !
Maintenant nous sommes seuls et sans Lui, la libération d’lsraël à laquelle nous avons tous cru, me parait irrémédiablement compromise...
Tiens, il y a quelqu’un derrière nous. »

M. : « Eh ! Bonjour ami. Tu vas à Emmaüs ?
Si tu veux, nous allons faire route ensemble. »

Jésus : "Volontiers. Vous aviez l’air de discuter tous les deux. De quoi s’agit-il ?"

M. : "Mais de ce qui s’est passé à Jérusalem, pardi ! De quoi veux-tu que nous parlions ?"

Jésus : "Quoi donc ?"

M. : "Tu es bien le seul à séjourner à Jérusalem qui n’aies pas appris ce qui s‘y est passé ces jours-ci."

Mme : "Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth qui était un prophète puissant en action et en parole, devant Dieu et devant tout le peuple."

M. : "Oui. Mais nos grands prêtres et nos chefs l’ont livré pour être condamné à mort et il a été crucifié. Ils ont agi par jalousie, par peur ; c’est sûr."

Mme : "Et maintenant comment espérer la libération d’Israël. Sans Lui que faire ?"

M. : "On a cru avoir un petit espoir, parce que quelques femmes qui font partie de notre groupe ont prétendu qu’elles avaient eu une vision en allant à son tombeau, et elles auraient appris qu’Il était vivant. Mais comment les croire ? Et d’ailleurs personne d’autre ne l’a vu, Lui."

Jésus : « Décidément vous avez la tête dure. Votre esprit est sans intelligence et votre cœur lent à croire. Si vous vouliez bien vous rappeler ce que vous ont appris les prophètes...
Allez. Je vous explique.
Il fallait bien que le Christ souffrit tout cela… »

Et en commençant par Moïse, II raconta tout ce qui concernait le Christ.
Arrivant au village, il fit mine de les quitter.

Mme : « Reste avec nous, la nuit approche.
J’en ai pour une minute à préparer le dîner. Ce sera simple, hein ! Vu les circonstances je n’ai rien prévu, on fera avec ce qu’il y a. »

M. : « Entre, entre, tu nous feras plaisir. C’est passionnant la façon dont tu racontes. Jamais, je n’aurais pensé à tout ça.
Tiens, assieds-toi, là, dans ce fauteuil. Tu seras très bien.
Mais où ai-je la tête ? Avant, veux-tu te rafraîchir un peu. Les gosses ont du préparer l’eau dans le cagibi d’entrée. C’est par-là. Mets-toi à l’aise. »

Mme : « Allez, venez vous mettre à table. J’apporte le pain, le vin, un peu d’eau, le reste arrive.
Julie (c’est ma fille aînée), Julie, appelle les enfants. On va dîner. Dis-leur de se laver les mains. »

L’ami prit le pain, le vin, dit la bénédiction, rompit le pain et le leur donna...
Alors ils Le reconnurent. C’était Jésus.
Mais II disparut à leurs yeux.

Mme : « Ça alors, » dit Mme Cléophas, « je le savais, Je le sentais... »

M. : "Mais oui, ajouta son mari, notre cœur ne brûlait-il pas en nous tandis qu ’Il nous parlait.
Vite, il faut retourner à Jérusalem, avertir les autres..."

Mme : « Dis, ça fait encore 9 km et il fait nuit noire...
Mais tu as raison, il faut y aller. Je suis trop contente. Il faut leur dire.
Tiens je t’embrasse.
Tu m’excuses pour tout à l ’heure, quand je t’ai dit des paroles méchantes ? »

M. : "Mais oui. Mais oui, c’est oublié, et de toutes façons, tu n’avais pas tort. On a tous eu une drôle de pétoche !"

À l’instant même, ils partirent à Jérusalem. Ils trouvèrent réunis les onze et leurs compagnons qui leur dirent : "C’est bien vrai, le Seigneur est ressuscité. Simon Pierre l’a vu." À leur tour, ils racontèrent ce qui s’était passé sur la route, et comment ils l’avaient reconnu à la fraction du pain.

Quand on pense à ce qui s’est passé sur la route d’Emmaüs, notre cœur n’est-il pas brûlant comme ceux de M. et Mme Cléophas ?
Mais Seigneur, pourquoi a-t-on tant de mal à Te reconnaître quand Tu es présent, et pourquoi disparais-Tu quand on pense pouvoir profiter de Ta présence ?

C’est peut-être nécessaire cette présence absente, mais je T’assure, c’est frustrant. Il est vrai que ça oblige à continuer à chercher. On ne doit pas essayer de Te tenir, de Te retenir. L’amour n’est jamais possession mais don. C’est sans doute ça que Tu veux me faire comprendre, n’est ce pas, Seigneur ?

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Françoise REYNÈS

Laïque mariste († 2011).

Publié: 01/04/2018