Les sadducéens et la Résurrection

Les sadducéens viennent t’interpeller au sujet de la Résurrection.
C’est un texte pas facile, facile, sur lequel il va falloir plancher (mon curé dirait sans doute méditer, de préférence avant la cérémonie, de façon à bien le goûter).
Je vais donc le lire, pas trop vite, en notant ce qui me parait bon comme exemple à suivre, et ce qui est à rejeter.

Remarquons tout d’abord que Luc a parlé de cette rencontre et que Mathieu et Marc la mentionnent également, en termes presque identiques. C’est donc un épisode auquel tu attaches une importance certaine. C’est bon à savoir.
Il est donc question de sadducéens. Je crois savoir que ce sont des gens que les questions religieuses intéressent fortement. Ils sont en recherche, ce qu’on n’a jamais fini de faire, pour essayer de se rapprocher de toi, Seigneur. Ils sont donc venus te trouver. On peut penser qu’ils te prennent pour une personne de référence. Et ils vont te poser une question sous forme d’un exemple concret. Jusque là, leur démarche me parait excellente.

Mais l’exemple qu’ils proposent est truqué. Certes ils invoquent une règle donnée par Moïse (règle destinée à susciter une postérité à l’homme décédé sans enfant) mais ils inventent une histoire invraisemblable d’une femme qui épousera l’un après l’autre sept frères qui meurent sans enfant. Il y a fort à parier que de nos jours, la malheureuse se serait retrouvée en garde à vue, dès le deuxième et à plus forte raison dès le troisième veuvage, sur un soupçon d’empoisonnement très crédible. Mais ce n’est pas le sujet. Ce qui est sûr par contre, c’est que quand on cherche à être éclairé sur une question qui pose problème, il faut être neutre, indifférent, dirait, je crois Ignace de Loyola. Si on y va avec une opinion bien ancrée, le questionnement est nul. On cherche seulement à manipuler celui qu’on vient soit disant interroger. C’est malhonnête, à rejeter.

Et pour une fois, - et je m’en réjouis - ta réponse Seigneur est nette et sans ambiguïté : « Vous vous égarez », diras-tu, « vous êtes complètement dans l’erreur », disent certaines traductions.
Ça n’est pas souvent que tu réponds si clairement. Quand on t’interroge, il t’arrive souvent d’inviter ton interlocuteur à réfléchir sur la pertinence de sa question. Il t’arrive de raconter une parabole.
Là, c’est franc et massif. Dieu n’est pas le Dieu des morts mais des vivants. La Résurrection est une donnée sûre.
Notons que les sadducéens n’en démordront pas et Paul saura s’en servir lors d’un procès où pharisiens et saducéens se seront ligués pour le faire condamner, ça entraînera une bagarre mémorable... Mais passons.

Je pense que si tu as été si persuasif c’est qu’il y avait dans l’ancien Testament, notamment dans les psaumes des passages qui pouvaient prêter à confusion. II était écrit que la mort entraînait une rupture totale entre le défunt et toi-même Seigneur. Certes ils étaient formulés généralement de façon interrogative m’a t-on dit, mais le psalmiste avait l’air de pencher pour la rupture : « Au séjour des morts qui te rends grâce ? » II était donc nécessaire, que tu sois très ferme. Ce qui est très bon pour nous.

II résulte donc de ta déclaration, que les vivants et les morts peuvent être en relation avec toi Seigneur. Et alors il me semble qu’on a intérêt à être intime avec toi le plus tôt possible, pour que la relation soit forte.
On le sait bien quand on rencontre quelqu’un pour la première fois, on n’a pas grand chose à se dire : le temps qu’il fait, les bourdes de la météo sont bien commodes pour meubler l’entretien, mais avec toi Seigneur, ça ne serait pas d’un grand secours. II est donc souhaitable d’instaurer un échange intime amoureux avec toi, le plus tôt possible. Ça tombe sous le sens.

Et tu prends aussi le soin de préciser qu’il est inutile de chercher à savoir sous quelle forme nous ressusciterons. Ce sera totalement différent de ce que nous sommes sur terre. Nous serons comme des anges as-tu dit. D’un côté c’est heureux que ce soit totalement différent, car autrement, ça ne vaudrait pas le coup d’y aller, mais d’un autre côté, ça ne nous avance pas beaucoup, car on ne sait à peu près rien sur les anges, même pas leur sexe, dit une boutade. Ça a l’avantage de calmer notre imagination débordante. C’est peut être frustrant, mais c’est aussi très reposant. II suffit de faire confiance... On est Fils de Dieu, on ne peut rêver d’une filiation plus enviable. Encore faut-il être jugé digne d’entrer au ciel. Ce qui me parait normal. Et à voir la rage des démons qui s’en sont exclus, on peut légitimement penser que ça sera super.

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Françoise REYNÈS

Laïque mariste († 2011).

Publié: 01/11/2013