Méditer les psaumes

Les Psaumes... 150 poèmes, 150 marches entre ciel et terre ; cris des hommes où nous pouvons reconnaître nos admirations, nos doutes, nos révoltes, nos espoirs, nos désespoirs...

Des mots de sagesse : Ps 1 ; d’admiration : Ps 8 ; des cris de souffrance : Ps 22(21), d’appel au secours : Ps 69(68), ou de confiance tranquille : Ps 23(22), 131(130) ; des mots d’amoureux : Ps 63(62). On peut choisir tranquillement, selon les jours.

En participant à l’office des moines, au hasard d’une halte dans une abbaye, on va passer sans transition d’une attitude à l’autre, comme dans la vie parfois, ou d’une page à l’autre en lisant le journal ! Parfois c’est à l’intérieur du même psaume : le priant du Ps 139(138) est calmement heureux sous le regard du Seigneur, humblement admiratif devant « le prodige, l’être étonnant » que le Seigneur « a tissé dans le sein de (sa) mère » et il s’enhardit jusqu’à dire au Seigneur : « Tu devrais bien exterminer les méchants ! » (v.19). C’est vrai que la vie serait plus simple... Mais ce n’est pas le genre du Seigneur ; sinon, d’ailleurs, « qui donc subsisterait ? » Ps 130(129) v.3 ! Qui n’a pensé une fois des choses pareilles ?

Dans ce qui est donné à tous comme modèle de prière, notamment à tous les religieux, diacres et prêtres du monde, se trouve vraiment « tout ce que vous voudriez dire à Dieu sans oser le lui dire ». Notamment quand on ne le comprend plus , quand il « n’est plus comme avant » !

Seigneur, je veux y croire, mais je ne Te reconnais plus !

Un jour ou l’autre nous avons eu ou nous aurons envie de dire cela.
Tant mieux si cela peut se faire en prière comme dans le Psaume 77(76) !

On ne saura pas dans quelles circonstances précises ce psaume est né. Les traductions proposent plusieurs titres : « Plainte dans la souffrance et la persécution », « Prière dans la détresse, et rappel des hauts-faits du Seigneur ». Je peux en ajouter d’autres, selon ce que je vis moi-même et en laissant les mots du psalmiste résonner en moi.

Je vois bien que c’est un appel, un cri, dans la nuit. Il (ou elle, pourquoi pas ?) s’accroche au Seigneur en cherchant à comprendre.
D’abord « incapable de parler », il lance au Seigneur cinq ou six interrogations, apparemment sans réponse, mais cela lui permet d’exprimer exactement ce qui lui fait mal : « Je le dis, mon mal vient de là : la droite du Très-haut a changé ! »

Il « se souvient », il connaît son « histoire sainte » ; il est capable de réciter par cœur le crédo et même des cantiques disant que le Seigneur fait des merveilles. Mais rien n’est plus comme avant ! Jadis, c’était clair, maintenant on n’y comprend plus rien ! Et pourquoi Dieu semble-t-il absent, alors qu’on l’appelle au secours ? Et pourquoi y a-t-il des méchants triomphants, des salauds, le mot a échappé, alors que des bons, des fidèles, souffrent ? Et combien de temps cela va-t-il durer, sans que Dieu réagisse ?

Depuis que je prie avec les psaumes, je suis frappé de voir que ce genre de questionnement est le « genre littéraire » le plus représenté dans le psautier. Plus que les alléluias et les « je crois » pacifiques.

Si ce n’est pas notre propre sentiment aujourd’hui, avec combien d’hommes d’aujourd’hui prions-nous ce psaume ? Jésus lui-même n’a-t-il pas poussé le grand cri du Ps 21,2 : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Même si sa prière, comme notre psaume 77, s’achève sur un acte de foi renouvelé, relié à un « souviens-toi ! ». La longue expérience des croyants n’est pas trompeuse. Le credo n’est pas trop beau pour être vrai. C’est aussi mon histoire. « Je me souviens... »

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Fernand PROD’HOMME p.s.s.

Prêtre du diocèse du Val de Marne.

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Publié: 01/07/2005
Les escales d'Olivier