27e dim. ordinaire (5/10) : Pistes pour l’homélie
Piste 1
« Tu es le dépositaire de l’Evangile, garde-le dans toute sa pureté grâce à l’Esprit Saint qui habite en nous. » (2e lecture). « Garde-le dans toute sa pureté », le mot ‘garder’ me rappelle le temps de mon service militaire où l’on « montait la garde ». Il fallait montrer « patte blanche » pour pouvoir entrer dans la caserne ou le camp. Tous les autres étaient refoulés.
En lisant ces mots de saint Paul, certains sont tentés de ‘garder’ l’Evangile de la même façon, un trésor à protéger contre les agressions extérieures, quitte même à élever des bûchers pour éliminer tous ceux dont l’interprétation n’irait pas dans le sens de la doctrine officielle.
Mais voir les choses de cette façon c’est oublier la fin de la phrase : « grâce à l’Esprit qui est en nous ». Cela change tout ! Parce que l’Esprit Saint n’a rien de commun avec le pion surveillant ni la garde militaire. Au contraire il est celui qui ouvre les portes et les fenêtres pour permettre à tous – chrétiens ou non - de lire l’Evangile et d’y puiser une nourriture bienfaisante qui fait vivre.
N’est-ce pas aussi un peu ce que signifie l’Evangile de ce jour ?
Comme des employés de banque demandent une augmentation de salaire, les apôtres demandent aussi à Jésus une augmentation de foi : « augmente en nous la foi » ! Et Jésus sur un ton plein d’humour leur répond : « la foi, si vous en aviez gros comme un grain de moutarde, vous déplaceriez les montagnes. »
Cette réflexion anodine est importante parce qu’elle renverse nos conceptions sur la foi.
Généralement, et je pense que c’est vrai pour toutes les religions, nous réduisons la foi à une conviction intellectuelle, une adhésion à des vérités, un credo, des croyances…
Or pour Jésus que signifie la « foi » ? Quelle découverte nous propose-t-il concernant la foi ?
Jésus signifie d’abord que la foi ne part pas d’elle-même, elle trouve sa source en Dieu.
Dieu en a l’initiative, elle est un don gracieux. Or si la foi est don, elle devient accueil, elle devient relation, communication, échange entre nous et Dieu, entre Dieu et nous.
Si la foi est un don, elle nous fait d’abord reconnaître que nous ne sommes pas notre propre origine. Nous ne sommes pas le fondement de notre propre existence ni même de nos œuvres. Nous recevons tout de l’autre.
Par le fait même, la foi nous aide à reconnaître en toute humilité que nous ne sommes pas grand-chose devant l’immensité des problèmes du monde mais que nous sommes cependant capables, avec l’aide de Dieu, de réaliser des prodiges, de déplacer des montagnes.
La foi, comme l’amour, n’est pas seulement une idée, une vérité à croire, ni une conviction que l’on s’enfonce dans la tête, à la méthode Coué, mais elle est d’abord un engagement. La foi ne peut s’entretenir et grandir que dans le concret, par des gestes et des actes vécus au quotidien.
En résumé, ou pour le dire autrement, il y a bien des obstacles à la foi :
– le 1er est de s’accrocher à ses certitudes comme on s’enferme dans une citadelle sans laisser germer en nous la nouveauté de l’Esprit.
– Un 2e obstacle à ma foi c’est de vouloir entretenir avec Dieu une relation de type cérébral, intellectuel ou une spiritualité éthérée, déconnectée de la réalité concrète, de la vie du monde.
– Un autre obstacle, c’est d’entretenir avec Dieu une relation marchande, qui met Dieu en position de dépendance, nous agissons pour mériter, pour gagner ses faveurs.
Or la logique de nos relations avec Dieu est la même que la logique de l’amour : ce que l’on fait par amour n’est jamais fait dans un but intéressé mais en pure gratuité ou pour reprendre les mots de Jésus, on le fait inutilement. Dans l’amour, nous sommes des serviteurs inutiles.
Piste 2
« Seigneur augmente en nous la foi ! » Cette réflexion des apôtres me fait penser à un ouvrier ou un employé qui à cause des conditions difficiles de travail vient frapper à la porte de son patron pour réclamer une augmentation de son salaire.
De même sans doute, les apôtres effrayés par la tâche énorme qui les attend, voyant l’immense misère du monde à laquelle ils devront s’attaquer, se disent : « nous n’en sortirons jamais ! » Alors ils viennent demander à Jésus une augmentation de foi. Ils la voudraient un peu plus solide, résistante, de meilleure qualité.
Et Jésus sur un ton un peu ironique leur répond : « La foi si vous en aviez gros comme un grain de moutarde… »
Nous aussi, comme les apôtres, nous aurions envie, devant l’ampleur de la tâche, les souffrances, les violences, les injustices, le mal… nous aurions envie de demander à Jésus de nous injecter une bonne dose de foi pour continuer à croire malgré tout, à vivre, à lutter.
Mais que veut nous dire Jésus en nous répondant : « Si vous aviez la foi… » ?
Jésus nous montre que croire ce n’est pas ce que nous pensons spontanément. Il ne faut pas confondre « foi » et « croyance ». La foi n’est pas une adhésion à des vérités ou à des dogmes. Elle ne fait pas disparaître nos questions, nos interrogations. Elle n’est même pas non plus une sorte de conviction plus ou moins profonde que l’on perd aujourd’hui pour la retrouver demain…
Mais alors qu’est ce que la foi ?
La foi ne part pas de nous-mêmes. Dieu en a l’initiative, elle est un don gracieux de Dieu. Ce qui signifie qu’elle est accueil et devient relation. La foi c’est reconnaître que nous recevons notre existence. C’est reconnaître que si nous sommes peu de choses devant l’immensité des problèmes du monde, nous sommes néanmoins capables de changer la face du monde, mais… avec l’Esprit de Dieu.
Ceci me fait penser à cette réponse de Mère Teresa à un journaliste qui lui demandait : « Quand vous voyez ces foules affamées, cela ne vous décourage pas ? » Mère Teresa répondit : « Je ne regarde pas les foules, je ne vois que des personnes. Je commence par la 1re puis la 2e et puis la 3e… Si je regardais les foules je ne commencerais jamais… Le Seigneur avec l’aide des autres, se charge du reste. »
Oui, il n’est pas facile de croire lorsque nous sommes témoins de tant de violence, d’intolérance même au sein de nos communautés chrétiennes… Il est difficile de croire lorsque nous assistons impuissants au mépris flagrant des droits les plus élémentaires de l’Homme.
Mais si nous ouvrons les yeux, nous verrons que, parfois très proches de nous, des hommes et des femmes ignorés et humbles donnent leur vie jour après jour obscurément. Si nous ouvrons les yeux nous verrons l’effort discret et obstiné de tant d’hommes et de femmes pour que nos sociétés restent humaines ou le deviennent davantage.
La foi, la force de la foi est donc un accueil permanent, chaque jour renouvelé, une naissance perpétuelle et une création continue.
Chaque jour la foi nous est offerte, acceptons-la, non pour la mettre dans un coffret comme un trésor, car la foi ne se conserve pas, on ne peut se l’approprier, elle est une semence, une graine qui ne se garde qu’en grandissant, en se partageant.
Alors elle sera capable de déplacer les montagnes, nos montagnes d’indifférence, d’égoïsme, de paresse. Oui, avec un brin de foi, l’humainement possible pourra mystérieusement se réaliser.

Prêtre du diocèse de Namur, † 2017.
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