Trinité Sainte

1. « Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. » Nous avons commencé la célébration par ces mots en nous couvrant du signe de la croix et par ces mots nous la terminerons. Il fut le premier signe marqué sur nous le jour de notre baptême. Ne sera-t-il pas encore le dernier qu’on portera sur nous lorsque nous sortirons de l’église pour aller reposer sous l’ombre de la croix ? Entre temps, combien de fois n’avons-nous prononcé ces paroles en nous couvrant de ce signe ? Machinalement ou consciemment. Courbé dans l’aveu de notre faiblesse ou, debout, le visage levé vers le ciel pour recevoir la grâce d’en haut.

2. Dieu en trois personnes, voilà notre credo depuis les conciles de Nicée et de Constantinople au 4e siècle. Voilà bien ce qui choque tant nos frères juifs ou musulmans. Dieu est Unique n’a cessé de crier la foi juive. Allah seul est Dieu répète le croyant de l’islam dans sa prière quotidienne. Dieu en trois personnes. Augustin fut hanté 16 ans durant par ce mystère. Une légende raconte que, voyant un enfant prendre de l’eau avec un coquillage dans la mer pour la verser dans un trou du rivage, il lui demanda ce qu’il faisait. « Je veux y mettre toute la mer. » Augustin lui aurait répondu que c’était impossible. L’enfant lui rétorqua qu’il aurait achevé avant qu’il ne comprenne le mystère de la Trinité. D’autres Pères de l’Eglise ont essayé de trouver des images, comme Grégoire de Naziance : « Le Père est la source, son Verbe est le fleuve, l’Esprit est le courant. » Comme Catherine de Sienne : « Dans le soleil, l’on ne saurait séparer la chaleur de la lumière, ni la lumière de la chaleur. » Le chanoine Kir, de Dijon, proposait de la regarder, non comme une addition (1+1+1) mais comme une multiplication (1x1x1), 1 à la puissance trois est toujours égal à 1.

3. C’est en nous couvrant du signe de la croix que nous invoquons la Sainte Trinité. Les orthodoxes portent la main sur les épaules à l’envers de nous, considérant que l’épaule droite du Christ que l’on a devant soi correspond à notre côté gauche. Ils ajoutent que les deux derniers doigts doivent rester pliés dans la paume pour symboliser la double nature du Christ. La croix met le Christ au centre de notre foi en la Sainte Trinité. Celle-ci n’est donc pas à regarder comme une froide et inaccessible vérité. C’est donc vers la croix, que nous devons regarder. Et ce que nous voyons c’est la Sainte Trinité en croix ! Le Christ en Croix nous dit la Sainte Trinité.

4. On peut dire, de la Sainte Trinité, qu’elle est famille céleste. Le Père n’est-il pas, par nature, source d’amour et de vie ? Que le Fils reçoit et sait le rendre en retour de la plus haute manière en lieu et place de l’humanité. L’Esprit dit la force unifiante de cet amour divin partagé. Faisons de la Trinité une affaire de famille. Pas seulement de notre famille naturelle, mais aussi de celle que forment tous ceux et celles avec qui nous vivons quotidiennement. Du Père, qui fait pleuvoir sur les justes et les injustes, apprenons la générosité qui ne lésine pas sur des considérations qui la restreignent. Elles ont des motifs nombreux, tels notre envie du “pour soi”, nos sentiments d’antipathie, et bien d’autres que nous pouvons et devons identifier. Du Fils, apprenons la reconnaissance et le partage des dons reçus. De l’Esprit Saint, apprenons à nous rapprocher plutôt qu’à nous distancer, à créer et conserver des liens plutôt que de les refuser ou de les laisser se perdre. Si notre foi en Dieu ne passe pas par le cœur, nos bras resteront fermés plutôt qu’étendus. Certes le signe de la croix nous rappelle que cela n’ira pas sans avoir à la porter, mais aussi, comme Simon de Cyrène, à prendre un peu de la croix de l’autre. Le Christ Jésus ne portait pas sa croix, mais les nôtres. Faisons-le donc au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen.