33ème dimanche
1. Dans son évangile, écrit dans les années 80, Luc se souvient d’un événement majeur d’un tout récent passé qui a changé le monde : la prise de Jérusalem par Titus, le 25 septembre 70. Selon l’historien juif, Flavius Josèphe qui en fut témoin, elle fit plus d’un million de morts, cent mille prisonniers dont sept cents furent emmenés à Rome avec le trésor du Temple pour célébrer le triomphe de Titus. Le Temple fut incendié et la ville complétement rasée. Il n’en reste que le mur occidental et la tour de David que l’on voit aujourd’hui. Ce fut la fin de l’état juif et le commencement de la grand dispersion de ses croyants dans le monde, la diaspora.
2. En son temps, Jésus avait beaucoup critiqué les chefs du Temple, les sadducéens, pour avoir mis au premier rang de la foi le culte sacrificiel du Temple. Selon les évangélistes, il avait annoncé, comme nous venons de l’entendre, « qu’il n’en restera pas pierre sur pierre : tout sera détruit. » Cela lui donne l’occasion de leur parler de la conduite à tenir lorsque viendra pour eux le temps des épreuves. Et les épreuves, ils n’en manqueront pas comme celles que Paul nous dit avoir subies, comme celles que Néron avait fait subir aux chrétiens de Rome lors de son incendie en 64, comme celles qu’ils rencontreront au sein même de leurs familles. « Prenez garde, dit Jésus, de ne pas vous laisser égarer… Rendez témoignage… Ne vous préoccupez pas de votre défense. Mettez-vous dans l’esprit que c’est moi qui vous donnerai un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront ni résister ni s’opposer… C’est par votre persévérance que vous garderez votre vie. » En harmonie avec sa promesse : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps ! » Que des paroles d’encouragement pour le temps à venir.
3. Aujourd’hui, les épreuves ne nous manquent pas. Pour nous d’abord. « Pourquoi moi ? » est une question que se sont posés nombre de personnes croyantes ou non dans les épreuves. Celles que nous subissons par suite de notre fragilité ou celles qui nous viennent d’ailleurs. Ce 13 novembre, nous reviennent en mémoire toutes les victimes des attentats terroristes. On ne peut oublier toutes les victimes des guerres, celles d’hier dont les cérémonies du 11 novembre nous font souvenir, mais aussi de celles des guerres et persécutions en cours, trop souvent au nom de croyances religieuses. Il ne se passe pas un jour sans que l’on apprenne mort violente d’homme, de femme, d’enfant. Des épreuves pour l’Eglise aussi. Le Christ l’a voulue sainte, assise sur le roc, contre laquelle « la puissance de la mort ne pourra rien ». Mais, comme l’a reconnu le pape François dans l’avion au retour de Bahrein, « L’histoire de l’Eglise est laide ». Beaucoup de ses responsables qui l’ont illuminée, l’ont aussi humiliée un jour sans peut-être même s’en rendre compte. Ne l’a-t-il pas été par Pierre, le premier des apôtres qui pourtant avait juré de lui rester fidèle, à son corps défendant ? Mais Jésus le regarda et le mit en pleurs. En son temps François d’Assise fut appelé à reconstruire l’Eglise, tant elle était en train de s’effondrer sous les coups des incuries, des abus de ses papes, de ses prêtres, de ses moines. Mais au-dessus des turpitudes humaines, Jésus demeure. Si des chrétiens ont décidé de quitter l’Eglise, notre fidélité ne doit pas en être altérée. Plus que jamais la persévérance doit nous guider.
4. A l’image de celle de Jésus. Il l’a montrée à ses disciples en passant devant. Il est passé devant les soldats des Chefs du Temple, devant Caïphe, devant Hérode, Pilate. Tous remarqueront sa dignité et la force de la fidélité à sa mission. Ils feront taire sa voix, défigureront son visage, écartèleront son corps, perceront son cœur mais ne pourront jamais dire qu’ils ont eu raison de son Esprit. Jésus est resté fidèle à ce qu’il savait être la grandeur de l’homme, est monté au plus haut d’une croix, par amour de lui. Peut-on, à son exemple, donner du sens au malheur ?
5. Simone Weil, la philosophe juive, d’origine alsacienne, convertie intérieurement à la foi chrétienne nous met sur le chemin. Très engagée dans le syndicalisme, dans la guerre d’Espagne, dans la résistance, auteur de très nombreux ouvrages dont « La pesanteur et la Grâce », morte à l’âge de 34 ans, a écrit : « L’extrême grandeur du christianisme vient de ce qu’il ne cherche pas un remède surnaturel contre la souffrance, mais un usage surnaturel de la souffrance. » Une de ses amies, sa biographe explique cette attitude : « Puisque le malheur existe dans le monde, elle supportait mal de ne pas en avoir sa part ; et surtout elle croyait qu’il faut y avoir part pour comprendre par quels moyens on peut réellement y remédier. Plus tard, en outre, elle a pensé que seul le malheur peut faire connaître la vérité de l’existence, la vérité complète et absolue. » Huit lycées portent son nom.
Alors, oui, à la place de la tristesse et du découragement ressentis devant la sombre réalité de tant de malheurs, de souffrance du monde comme des miens, je ferai tout pour trouver dans mon attachement au Christ la force de la persévérance. Bernanos écrit dans ‘ Les grands cimetières sous la lune’ : « Nous, frères chrétiens, nous sommes des inconditionnels du Seigneur. »
La Cathédrale incendiée
La cathédrale était pourtant belle
Jusqu’ à l’incendie qu’on n’a pas vu venir
Et qui fit tomber sa fière tourelle
Et entraîner tout ce qui la faisait tenir.
Devant tes demeures tombées en ruines
Je ne sens, Seigneur, que désolance
A la recherche de quelque bout de prière
Pour leur rendre un peu de ta présence.
Pourtant c’est de notre cœur de pierre
Qu’il faut d’abord nous inquiéter
Plus que celles qu’on met par terre
Aide-nous Seigneur à nous en délivrer
Toi, Notre Dame, qui sortit de cet enfer
Sans aucune fracture, ni salissure
Protège mon âme de toute brisure
Garde là sous ton manteau de lumière.

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.
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