2e dimanche de l’Avent

1. Quelle solennité dans cette annonce mais aussi que de dissonances. C’est un événement inscrit dans l’histoire qu’il nous est proposé de lire. Au temps des grands de ce monde, Tibère, l’empereur à Rome, qui gouverne un empire de 55 millions d’habitants, dont l’un des subalternes se nomme Ponce Pilate, le gouverneur de Judée, les autres, des rois soumis comme Hérode prince de Galilée, Philippe prince d’Iturée et de Trachonitide. Bref, tout ce que la terre devait respecter et craindre. Mais celui qui crie ce message se nomme Jean, issu d’un village inconnu de Judée et dont on disait qu’il vivait frugalement, qu’il était vêtu de d’habits faits de poils de chameau, qu’il résidait dans des endroits désertiques, c’est-à-dire peu fréquentés. Comme un prophète d’antan. D’un côté les centres de commandement, les capitales d’empire, de l’autre le désert, l’incognito. D’un côté la puissance, la richesse, de l’autre la faiblesse, le dénuement monastique. Quelle discordance ! Elle en annonce d’autres.

2. Ce prophète, sans aucun pouvoir, sans aucune notoriété, crie depuis un endroit quasiment désertique, aux habitants de la terre entière : « Préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers. Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées ; les passages tortueux deviendront droits, les chemins rocailleux seront aplanis ; et tout être vivant verra le salut de Dieu. » Tout comme sa personne, son message détonne. Celui qu’il annonce, Jésus, descendra d’un village perdu dans la montagne pour se rendre dans la Galilée des nations, y proclamer un message qui dépasse la terre et parle d’éternité. L’un venait d’en bas, l’autre dira venir d’en haut. L’un parlait d’une venue, l’autre parlera d’un aller ailleurs. L’un criait, l’autre parlera dans la douceur. Autant de discordances qui ne finiront plus d’être semées par le Christ depuis le mont des béatitudes.

3. Le parcours de Jean préfigurait celui du Christ. Jusque dans son terme. Jean finira en prison, sera décapité par le prince de Judée, Hérode, pour lui avoir dit sa vérité. Jésus sera crucifié par ordre de Pilate, le lieutenant de Tibère, pour avoir dit Sa vérité. Derrière toutes ces discordances se cache un enseignement que Paul entendra du Seigneur : « Ma puissance donnera sa mesure dans la faiblesse. » () Telle n’est pas notre manière de voir la puissance. « Si tu es le Fils de Dieu, change ces pierres en pain » murmura le premier tentateur. « Descends de la croix » crièrent ses derniers tentateurs. On l’a suivi tant qu’on a voulu lui voir en donner des preuves appelées miracles, tant qu’on a vu en lui un roi à mettre au pouvoir. On l’a quitté dès qu’on l’a entendu dire qu’il ne donnait rien que de l’amour. Alors il s’est laissé étendre les bras pour montrer combien il en avait. L’apôtre Paul le dira magnifiquement : « Lui qui est de condition divine… s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, à la mort sur une croix. » La Toute-Puissance de Dieu serait-elle de ne pas en avoir ?

4. Jean le Baptiste comme Jésus, dont il était le précurseur, nous donnent un double enseignement. Le premier : celui de ne pas mettre le Seigneur à l’épreuve. Nous avons le droit de demander son aide dans les moments difficiles de notre existence certes. Mais faisons-le à la manière du lépreux de l’évangile, avec les mots à lui : « Si tu veux, Seigneur, si tu veux ! » Le second va plus loin, plus haut : demander l’Esprit Saint dont Jésus nous dit que le Père ne peut nous le refuser. Thérèse de l’Enfant Jésus nous l’a fait comprendre à sa manière : « Je ne demande que l’amour », à recevoir et à donner. Rien d’autre mais cet autre nous conduira à suivre les conseils de saint Augustin : « Une fois donc t’est donné ce court précepte : Aime et fais ce que tu veux. Si tu te tais, tais-toi par amour. Si tu parles, parle par amour. Si tu corriges, corrige par amour. Si tu pardonnes, pardonne par amour. Aie au fond du cœur la racine de l’amour : de cette racine il ne peut rien sortir que de bon. »

En ce temps de l’Avent, nous te prions, Seigneur, avec les derniers mots du livre de l’Apocalypse : « Maranatha ! », « Seigneur, viens ! ». Pour te rencontrer, Seigneur, pousse-nous à sortir pour combler les ravins creusés par nos « chacun pour soi », pour abaisser les collines élevées par nos « je me suffis à moi-même », pour rendre droits nos chemins rendus tortueux par nos calculs trop intéressés.

Un Autre doit venir

Un autre temps, Seigneur, doit venir,
Mais il me faut d’abord parcourir
Le présent pas à pas, lentement,
En marche vers ton avènement.

Un autre monde doit venir,
Mais il faut d’abord que cette terre
Me donne de passer par ces déserts
Pour savoir ce que soif veut dire.

Un autre jour doit se lever.
Mais il faut d’abord apprendre, dans la nuit,
L’espérance qui fait lever le soleil
Pour donner chaleur et couleurs à l’arc en ciel.

Un autre homme doit à nouveau naître,
Mais il faut d’abord qu’il connaisse la peine
Qui donne au marcheur de connaître
La saveur du soir d’une étape bien pleine.

Un jour, Seigneur, chez moi, tu dois venir,
Mais il faut d’abord qu’en ma demeure
Je te prépare la place d’honneur
A la table préparée pour ‘Servir’.

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 05/12/2021