2e dimanche de carême

1. Les trois évangélistes rapportent cet événement appelé « Transfiguration ». C’est dire son importance à leurs yeux. Pourtant ils n’en donneront aucun commentaire et se justifient en affirmant que Pierre, Jacques et Jean avaient reçu l’ordre de ne pas en parler. Il appartient donc au croyant qui le lira de l’interpréter en tenant compte des éléments on ne peut plus frappants : Jésus en prière, le visage devenu brillant comme le soleil, les vêtements éblouissants de lumière s’entretient de son départ à Jérusalem avec Moïse et Elie, les deux grandes figures de l’histoire juive. Les disciples se disent à moitié éveillés, comme en songe, et Pierre rêve d’y rester : « Je vais dresser ici trois tentes, une pour Moïse, une pour Elie, et une pour toi. » Mais Moïse et Elie disparaissent et laissent Jésus seul.

2. Très vite cet événement a été mis en parallèle avec celui du jardin des Oliviers. Jésus est aussi en prière, mais prostré, le visage couvert de sang. Quant à ces trois mêmes disciples, ils dorment, et ne se laissent pas réveiller. Et puis viendra le jour de l’abandon de tous, du reniement de Pierre, du vêtement pourpre, de l’arrachement des habits et de la mise en croix élevé sur une autre colline, celle du Calvaire. Tous les traits de ce récit sont en contre-point de ceux du jour de la transfiguration. Manifestement leur rapprochement a un sens. Lequel ?

3. On l’a cherché et trouvé dans un troisième récit, celui de la résurrection. Après la montagne de la transfiguration, la colline du calvaire, viennent les rencontres au cénacle, au bord du lac avec celui qui n’est plus le même tout en étant le même. Celui qu’ils avaient cru voir au-dessus du monde, puis mis hors du monde, était maintenant à nouveau de ce monde. Alors le récit de la transfiguration devint révélation cachée de celui de la résurrection. Il était signifié par là que les événements vécus par Jésus n’étaient pas l’effet du hasard de la vie mais la réalisation d’un plan inconnu. D’abord caché, semblant voué à l’échec ensuite, mais finalement accompli.

4. Un enseignement nous y est donné. Il commence par un constat. Dans nos domaines d’activité, nous connaissons des périodes de réussite, de bonheur et de bien des rêves que nous souhaitons pouvoir réaliser. Mais la réalité est autre et des épreuves viennent les démolir. Les exemples ne sont pas rares. Une entreprise florissante d’abord va devoir fermer et mettre au chômage les ouvriers, les ouvrières qui s’en croyaient à l’abri. Une famille unie, heureuse, et des enfants comme bonheur, et voilà la séparation, le divorce ou le deuil. Comment ne pas penser à ces jeunes, pleins de rêves, mais que le harcèlement conduit au suicide. Il en est ainsi également dans le domaine de notre foi. Après des moments de grande conviction, on peut passer au doute, à l’inquiétude, à la perte de tout enthousiasme.

5. C’est là que Jésus se tient au milieu de nous. Toute épreuve lourde écrase et se laisser écraser fait mourir. Jésus nous invite au contraire à ne pas y voir la fin de tout. Regarder le Christ, l’écouter, c’est mettre dans notre vie une nouvelle manière de voir les choses, une nouvelle manière d’agir. Voir au-delà des apparences pour les « trans-figurer », y voir plus que ce que nous voyons. Tomber gravement malade avec un avenir incertain, vivre un deuil peuvent conduire à se refermer sur soi. Cependant notre épreuve peut nous permettre de mieux partager celle de l’autre. On ne la voit pas de la même manière lorsqu’on est à l’extérieur. La compassion prend alors une profondeur qui ne se dit pas. Elle devient communion. Bernadette fut surprise d’apprendre que personne ne voyait, n’entendait ce qu’elle voyait et entendait. Elle dira plus tard : « Il semble que le son ne passe pas par les oreilles mais par ici » en portant la main à son cœur.


Méditation

Aujourd’hui transfiguré, demain défiguré,
Aujourd’hui admiré, demain conspué,
Aujourd’hui entouré de ses amis,
Demain cloué sur le gibet d’infamie

C’est qu’il fallait la nuit de la passion
Pour voir le matin de la résurrection ?
C’est qu’il fallait passer par le très bas
Pour ne laisser personne dans le désarroi.

Lorsque viendra le temps des blessures
Faire silence, laisser les mots se taire.
Se mettre seulement sous le regard du Père
Pour que, de sa lumière, il les transfigure.

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 16/03/2025