25e dimanche du temps ordinaire
1. On voit d’ici un sourire amusé sur le visage des auditeurs de Jésus à la suite du récit de la conduite de ce gérant dilapidateur. Ils ont dû apprécier son habileté. C’est que dans ce monde sémite, très orienté vers le négoce, l’habileté en affaires est une preuve d’intelligence, une qualification de compétence reconnue par tous. Et la malhonnêteté de ce gérant, généreux avec les biens de son maître les plus nécessaires pour vivre, le blé et sa farine, l’huile, fut de loin éclipsée par son savoir faire. Mais, dit Jésus, ces amis qui vous attendront habitent d’autres demeures que les vôtres, des demeures éternelles. Le message de Jésus est clair : de vos biens périssables faites de l’impérissable. Le thème reviendra dans la parabole du riche et du pauvre Lazare.
2. Manifestement la place de l’argent est au centre de cette parabole qui se termine par une déclaration sans appel : Vous ne pouvez pas servir Dieu et l’argent. L’argent mis à l’égal d’un Dieu, cela rappelle le veau d’or que les Israélites dans le désert, durant l’exode, avaient choisi d’honorer en l’absence de Moïse alors en face du Buisson ardent. C’est indéniable : l’argent a le pouvoir attracteur le plus puissant, le plus universel qui soit. Nous avons entendu le prophète Amos le dénoncer avec véhémence sept cent ans plus tôt : « Nous allons diminuer les mesures, augmenter les prix et fausser les balances. Nous pourrons acheter le faible pour peu d’argent, le malheureux pour une paire de sandales. Nous vendrons jusqu’aux déchets du froment. » Récemment, il fut constaté que la diminution du prix annoncé comme une promotion d’un produit cachait une diminution de la quantité. De la fortune, certains feront le but de tous leurs efforts, d’autres, comme les ermites, moines et moniales, sages hindous, bouddhistes le fuiront. Entre eux tous, il y a nous qui avons de quoi vivre.
3. Mais il n’y a pas que l’argent que nous avons à gérer. Nous sommes des dépositaires d’autres biens qui ne sont point d’argent. La santé, le savoir-faire acquis ou inné en quelque domaine que ce soit, ne sont pas partagés de manière égale par tout le monde et il peut arriver, comme pour ce gérant, que ceux que nous croyons avoir pour la vie viennent à nous manquer. Comme la santé qui nous permet d’aller et venir à notre guise, de faire des projets et les réaliser. Elle peut changer du jour au lendemain. Un bien périssable entre tous. Alors il faudra nous remettre entre les mains d’autrui pour nous faire bénéficier de ce que nous n’avons peut-être pas pensé devoir faire. Nous avons quelque pouvoir de décision, la possibilité de dire oui ou non à des demandes, des sollicitations et nous sommes tous concernés un jour ou l’autre. On frappe à notre porte. On lit dans le premier livre des Rois que le prophète Elie demanda le peu de pain et d’huile de la veuve de Sarepta. Elle le fit et, poursuit le récit : « La farine qui était dans le pot ne manqua point, et l’huile qui était dans la cruche ne diminua point. » Anne Frank a écrit dans son journal : « Vous pouvez, toujours, toujours, donner quelque chose, même si c’est seulement la gentillesse. » Elle avait 15 ans. « Toutes choses périssables que Jésus nous invite à rendre impérissables. Alors le bon arbre portera ses fruits. Alors le pain sera multiplié pour être partagé. Alors l’eau deviendra vin.
Seigneur, ouvre mes yeux pour que je sois capable de voir ce dont mon voisin a besoin. Ouvre mes mains pour que je puisse lui donner de ce que, de Toi, j’ai reçu.

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.