16e dimanche du temps ordinaire

1. La route de Jéricho, la ville aux mille palmiers, à Jérusalem, passait par Béthanie, à trois kilomètres de la capitale. Les voyageurs se réjouissaient de pouvoir s’y arrêter pour se rafraîchir après cette pénible montée à travers un désert de pierres, sous une chaleur accablante en été. C’est là que résidaient Marthe, Marie et Lazare, des amis de Jésus. Il y est accueilli, avec quelques disciples certainement. Sûrement sans s’être annoncé. On comprend l’affairement de Marthe, la maîtresse de maison, qui a le souci de bien recevoir Jésus et ses amis. Mais Marthe sait aussi qu’on ne laisse pas les invités seuls tant la qualité de l’accueil est proverbiale dans ces pays. Elle va l’oublier.

2. « Cela ne te fait-il rien que ma sœur m’ait laissée faire seule le service ? Dis-lui donc de m’aider. » Marthe ne s’adresse pas à sa sœur pour lui demander son aide mais à Jésus, son hôte. Pour le mettre devant son manque de clairvoyance et lui demander de renvoyer Marie en cuisine. Surprenant mais pas insignifiant comme le montrera la suite du récit. Marie ne répond pas parce qu’elle écoute, à l’égal de tout disciple. Jésus, lui, répond parce qu’il porte la Parole de Dieu. Plus tard Jean dira qu’il est la Parole de Dieu. Il fallait Marthe et son mécontentement pour voir la mise au premier rang de Jésus, parole de Dieu, et de Marie qui l’écoute.

3. « Marthe, Marthe… » On sent plus de tendresse que de reproche dans les premiers mots de sa réponse. A son incompréhension, bien compréhensible, il lui demande d’accepter que « l’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ». « Tu te donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part et elle ne lui sera pas enlevée. » Jésus ne dit pas quelle est cette « chose nécessaire » mais elle est désignée dans l’attitude de Marie : assise à ses pieds, l’attitude de tout véritable disciple.

4. Cet événement ne peut donc pas se réduire à un fait divers. Il porte un enseignement. Celui que Jésus n’a cessé de mettre en avant : « L’âme est plus que le corps. » Ce jour-là il voulut rappeler que l’homme ne vit pas seulement du pain de ses mains, de l’eau de ses puits, de la réussite de ses projets. Il avait invité ses disciples à ne pas s’inquiéter de ce qu’ils mangeront, de ce dont ils se vêtiront. Ils ont fait le mauvais choix, ces invités à la noce qui préféreront aller à leurs affaires plutôt que de s’y rendre. Il se trompe, ce propriétaire qui pensait pouvoir s’endormir avec l’assurance d’un avenir assuré. Il ne doit pas prendre le temps de dire adieu à sa famille, celui qui venait de décider de le suivre. Sa famille, ce sont ceux qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique. Autant d’exigences que les disciples propageront au cours de leurs voyages missionnaires.

5. Pour autant, Jésus ne mésestime pas le travail des mains, les projets humains, lui qui, trente ans durant, en vécut et eut le souci du travail bien fait. Il n’a pas demandé la souffrance pour gagner la vie éternelle mais a proposé le chemin qu’a pris ce Samaritain, descendu de sa monture, pour venir au secours de ce blessé. Il a guéri ceux pour qui la vie n’était plus vivable. Ce jour-là, à Béthanie, nous a été signifié de ne pas nous laisser emporter par nos affaires au point de ne plus voir qu’elles, oubliant de nous asseoir près de lui pour mettre toutes choses à leur place.

Méditation

Avant que d’être Marthe, sois d’abord Marie.
Avant que ne t’emporte le tourbillon de la vie
Assieds-toi, fais taire un instant tous ses bruits
Qui remplissent tes jours de tant de soucis.

Avant que d’être Marthe, sois d’abord Marie
Écoute le silence que murmure la nuit
Pour te donner d’entendre, venu de l’ailleurs
Celui qui ne veut parler que de cœur à cœur.

Avant que d’être Marthe, sois d’abord Marie
Pour qu’au soir où viendra la dernière heure
Tu te réjouisses d’aller t’asseoir à demeure
Aux pieds de celui qui passa à Béthanie.