Besoin de câlins

Seigneur, ces temps-ci j’ai besoin de déposer mon fardeau et d’être câlinée, un peu comme le chiot de ma nièce qu’elle prend dans ses bras comme s’il s’agissait d’un bébé, qu’elle caresse et embrasse pendant qu’il affiche un air béat de pleine satisfaction. Il se sent aimé. Personnellement (mais je ne suis pas la seule dans la paroisse), je suis profondément désemparée après le départ de mon curé (parti à la retraite à 81 ans) et l’arrivée d’un prêtre étranger qui s’est révélé être néo-catéchuménal.

Tu le sais, Seigneur, ton Église, en France et dans de nombreux pays d’Europe, est en pleine crise. Dans la plupart des diocèses, on déplore un manque de prêtres et l’amenuisement du nombre des fidèles pratiquants, ce qui entraîne entre autre la diminution des recettes financées par ces derniers.

Pour remédier à ces déficits, certains diocèses ont essayé d’implanter des petits groupes de prière avec échanges sur Ta Parole grâce à un ou plusieurs animateurs laïcs qui reçoivent de temps en temps la visite d’un prêtre chargé de faire le lien entre ces groupes, de voir si ça fonctionne bien et, en plus de réalimenter la réserve de pain consacré ou alors on charge un curé de plusieurs paroisses dans lesquelles il officie à tour de rôle, obligeant les pratiquants à de longs déplacements ; d’autres diocèses se sont tournés vers les communautés nouvelles : Emmanuelle, Verbe de vie, Croix glorieuse, Nouvelle Évangélisation, Néo catéchuménat, Légionnaires du Christ, apparentés Lefébvristes, destinés à faire tourner le plus grand nombre possible de paroisses avec des prêtres souvent étrangers : polonais, allemands, italiens, espagnols, africains, brésiliens…

Bref, la situation est inquiétante, dans un cas comme dans l’autre. Les palliatifs me paraissent insuffisants, fragiles, voire dérisoires si pas franchement nocifs pour certains d’entre eux à tout le moins inopportuns. J’en viens à me poser la question : où est passé le souffle salvateur de Vatican II. Où allons-nous ? Vers quelle Église se demande le théologien Joseph Moingt dans un article percutant paru sur Internet ?

Pourtant Seigneur, Tu nous as dit que Tu resterais avec nous jusqu’à ton retour triomphal.
Je sais bien que ce n’est pas la première fois que ton Église est en crise sévère. Je pense au temps des Borgia, mais il y en a d’autres notamment en Argentine où nombre d’évêques ont conforté Pinochet... et paradoxalement peut-être, je vois dans ces graves dérèglements la preuve de ton indéfectible soutien, car si ton Église était seulement humaine elle aurait dû disparaître, puisqu’elle affichait avec assurance, autorité, voire cruauté, le contraire de ce qu’elle était censée prôner. Et j’ai envie de citer la boutade féroce et humoristique qui circule dans certains grands séminaires : « La preuve que Dieu existe c’est que les curés n’ont pas réussi à le tuer. » Cela va dans le même sens. Eh oui, l’Église existe grâce à Ta présence, et toute imparfaite qu’elle soit, puisqu’elle est humaine, elle m’a donné la chance d’entrer en relation avec Toi.

Merci, Seigneur, pour ce rappel qui me pacifie. J’en avais vraiment besoin. Je sais de source sûre que Tu m’aimes et que quelles que soient les circonstances Tu veux notre bien à tous.
Puis-je Te prier de câliner aussi mon nouveau curé, le « pôvre » ! Il doit se sentir non entendu, non compris, car malgré ses efforts intenses et son indéniable talent, il se trouve dans une paroisse, qui, dans sa grande majorité, freine des quatre fers, et refuse de se laisser endoctriner pour adopter les points de vue de sa famille religieuse, dont il donne l’impression qu’ils lui paraissent seuls valables.

Sil te plaît, Seigneur, aide-le.

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Françoise REYNÈS

Laïque mariste († 2011).

Publié: 01/01/2016