2e dimanche de Pâques

1. « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! » On comprend l’attitude de Thomas. L’événement de la résurrection est tellement incroyable ! Personne n’a jamais vu quelqu’un revenir à la vie après sa mort sauf dans les légendes. Thomas voulait voir Jésus comme les autres disent l’avoir vu. Lui n’a encore dans les yeux que les signes dont les hommes du Calvaire l’avaient marqué : les mains percées, le côté ouvert. Des signes de mort. Impossible à effacer de la vue par des avis qui laissent entendre le contraire. Il y a toujours une grande distance entre ce qui a été vécu par soi-même et celui que d’autres disent avoir vécu. La parole des autres n’emporte pas systématiquement l’adhésion à ce qu’ils expriment. Les disciples ne seraient-ils pas victimes d’une illusion ? Voir soi-même vaut plus que tout.

2. Mais il y a plus. Le témoignage des disciples sous-entend que Celui avec qui ils avaient marché, était d’une autre dimension que celle d’un homme semblable à eux. De cette dimension pourtant, Jésus leur avait parlé. En termes voilés certes comme de ce Père dont il disait qu’il était le sien, de ce lieu vers lequel il allait et dont Thomas disait ignorer le chemin. Ceux qui l’avaient conduit au Calvaire avaient compris qu’il se disait Fils de Dieu et lui en ont demandé la preuve : « Qu’il descende maintenant de la croix et nous croirons en lui. » L’événement du jour de Pâques ouvrit les yeux des disciples, leur fit souvenir de tout ce qu’ils avaient vu et entendu. Jean dit les avoir mis par écrit justement pour que ceux qui le liront croient que « Jésus est le Christ, le Fils de Dieu ». Thomas en est encore loin, absent du milieu de ceux-là. Et soudainement, ce jour-là, tout bascule : Thomas n’a plus besoin de toucher les mains percées, de mettre le doigt dans le côté ouvert. Celui qu’il voit n’est pas celui qu’il attendait de voir mais le transfiguré de la Pâque. C’est alors qu’il crut et sa fière exigence devint prosternation : « Mon Seigneur et mon Dieu. »

3. Nous sommes des frères jumeaux de Thomas. Frères jumeaux en nos limites qui ne permettent pas de voir au-delà de notre visible. Qui n’a jamais douté ? Qui ne s’est pas demandé si tout ce qu’on nous a dit, qu’on nous dit toujours, est bien vrai ? Si nous pouvions avoir des preuves, elles nous permettraient, nous semble-t-il, de ne pas marcher en aveugle et de convaincre autour de nous de la justesse de nos choix. Elles nous aideraient tellement, pensons-nous, à nous rendre plus croyants, parce que nous aurions de Jésus un sentiment de plus grande proximité, loin des yeux certes mais plus proche du cœur. Le doute fait vaciller la flamme de notre foi. Nous ne sommes pas les seuls. Elisabeth de la Trinité, Thérèse de Lisieux et d’autres grandes figures de la foi ont connu ce que Jean de la Croix a appelé la nuit de la foi. Mère Teresa l’a connue a écrit : « Tout le temps à sourire. Les Sœurs et les gens pensent que ma foi, mon espérance, mon amour me comblent en profondeur, et que l’intimité avec Dieu et l’union avec Sa volonté imprègnent mon cœur. Si seulement ils pouvaient savoir. » Mais elle ne s’est pas arrêtée de marcher avec lui. Notre raison peut se troubler sans que notre attachement doive être mis en cause. Tant d’événements comme l’indifférence, les épreuves, les scandales sont capables de faire vaciller notre foi, de faire dire à d’autres qu’elle n’est plus leur. C’est alors qu’il faut à nouveau nous souvenir de Thomas. Alors que les disciples déconseillaient à Jésus de monter à Jérusalem où ils le voyaient se faire lapider et devant son refus, Thomas leur a dit : « Allons, nous aussi, et mourrons avec lui ! » Après avoir été peut-être frères jumeaux de Thomas dans le doute, soyons-le dans cet attachement. Alors nous serons de ceux dont Jésus dit qu’ils sont heureux ceux qui croient sans avoir vu !

Seigneur, Toi qui as franchi les portes fermées du Cénacle, déverrouille nos réticences, donne la paix à nos cœurs inquiets. Donne-nous de vraiment ressentir que tu es avec nous « tous les jours jusqu’à la fin des temps.


Méditation

Le doute, cet ange habillé d’ombre et de lumière,
Veillant à la frontière du visible et de l’invisible
Pour interdire à ma prétention d’entrer dans ce pays
Que seule la foi d’un enfant permet de visiter.

Le doute s’invite, inattendu, à la table de mes certitudes
Pour appeler à la modestie mon envie de tout expliquer.

Le doute permet à la petite fille Espérance le droit d’exister
Et de me donner la confiance qui enlève toute inquiétude.

Le doute qui me fait hésiter devant la porte encore fermée
Pour me rendre plus impatient de découvrir le jardin caché.

Le doute qui interroge lorsque ma nuit devient plus obscure
Pour que je sache mieux apprécier l’aube et la beauté de l’azur.

Seigneur, fais que le doute
Sois pour moi chemin d’humilité,
Qui me permette d’apprendre
Que Toi, l’infiniment proche,
Tu es aussi le Tout Autre.

Une faute d'orthographe, une erreur, un problème ?   
 
Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 16/04/2023