Guetteurs d’aube

Six heures, les cloches tirent de leur sommeil les moines. Une demi-heure après, fidèle au rendez-vous de l’aube naissante, la communauté se forme progressivement avec l’arrivée des moines dans la pénombre de l’église. Ils prennent place dans le chœur pour la première prière du jour : les laudes, une prière de louanges. Tout au début, le psaume de cet office donne le ton : « Oh Dieu, mon Dieu, je te cherche dès l’aurore, de toi mon âme a soif. » Avant d’entreprendre quoi que ce soit, avant le premier café du matin, cette demande vient sur les lèvres des moines. Expression du désir de l’homme, avoué ou inavoué, reconnu ou enfoui, la prière des moines devient celle de l’humanité dont les bruits matinaux rivalisent avec les arpèges de la cithare. Autour du monastère, la vie reprend. Sur la route toute proche, premières voitures et premiers transporteurs vont à leur travail.

Ce matin-là, j’imagine qu’à la même heure, en de multiples points sur notre terre, de telles lumières s’allument. Multiplicité des feux qui trouent la nuit pour dire le désir de l’homme vers Dieu. Vu de quelque satellite, ce doit être extraordinaire d’imaginer, à chaque point lumineux, des veilleurs d’humanité, moines et moniales, religieuses et religieux de toutes confessions et aussi laïcs fidèles à cette prière matinale.

Alors que le soleil commence à donner tout leur éclat aux vitraux, ils chantent tous que la vraie lumière, c’est celle du Christ qui éclaire le cœur de l’homme. À quoi servirait-il d’avoir les yeux aveuglés par le soleil naissant si les ténèbres intérieurs l’encombrent ? En même temps que ces “orants” cherchent à les dissiper, les hommes et les femmes reprennent le chemin de leurs activités. Ils vont se dépenser, travailler à nouveau. En leur nom, ces priants ont tourné le monde vers Dieu. « Nous n’avons pas ici-bas de cité permanente, nous recherchons celle de l’avenir » chantent encore ces moines. Dès l’aube l’humanité retrouve ainsi le sens de sa marche.

« Tout ce que nous faisons est l’œuvre de Dieu qui s’accomplit par nos mains. » Avec cette parole du poète, reprise dans le chant, nos entreprises humaines peuvent s’orienter vers Lui.

Merci, frères moines, vous êtes pour nous les « guetteurs d’aube ».

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Michel AMALRIC

Prêtre du diocèse d’Albi, chargé de la communication.

Publié: 01/03/2013