J’ai cru... Je vois maintenant

Ceux qui ont ouvert son testament furent tout étonnés. Une recommandation manuscrite : « Sur ma tombe, ni fleurs, ni couronnes, seulement une inscription : ’’J’ai cru... Je vois maintenant’’. »

L’auteur de ce texte ? Un prêtre, André, de quatre-vingt neuf ans, qui vient de mourir tout aussi discrètement qu’il a vécu. Pendant plus de cinquante ans, il a exercé son ministère dans le même secteur au service de plusieurs clochers. Pasteur discret, il avait voulu rester au milieu de son peuple. Quelques mois après avoir fêté ses soixante ans de sacerdoce, avec beaucoup de regrets, il avait dû quitter les siens pour la maison de retraite.

"Monsieur le curé", comme l’appelaient ses paroissiens, fut un de ces prêtres parmi "les petits, les obscurs, les sans grade" (J . Rostand) dont on ne parlait guère dans les instances hiérarchiques. Le jour de sa sépulture, dans son église, beaucoup ont témoigné leur reconnaissance pour celui qui fut au milieu d’eux comme celui qui montre le chemin vers le Christ. "J’ai cru" nous dit-il aujourd’hui : un acte de foi, une confiance totale en Celui qu’il a annoncé pendant de longues années.

Cet homme "pittoresque", selon ses paroissiens, suscitait la bienveillance. Figure typique au milieu des siens, ils le voyaient venir au volant de son "Ami 8" dont n’émergeait que son béret.

À sa manière, de génération en génération, il a maintenu la foi d’une communauté chrétienne. Il a su répondre présent à tous ceux qui le sollicitaient pour les grands moments de leur vie : naissance, mariage, sépulture, anniversaire. Certains de ceux qu’il avait baptisés venaient à lui pour le baptême de leur propre enfant. De père spirituel, il devint ainsi grand-père spirituel pour de nombreuses familles.

Avec ses mots simples, il témoignait de sa foi. Aussi a-t-il pu demander que l’on écrive sur sa tombe : "J’ai cru." Cette inscription est une attestation de sa foi partagée, et reconnue. Pour le passant, il a voulu ajouter : "Je vois maintenant" en témoin fidèle de ce face à face tant désiré tout au long de sa vie.

Quelques jours avant, un autre prêtre de sa génération avait rassemblé, tout pareillement, des fidèles pour son dernier adieu.

Ces visages de prêtres, proches de leur peuple, disparaissent sans aucune relève. Insérés dans la vie locale, reconnus par tous, croyants ou pas, ces prêtres donnaient le signe d’une présence d’Eglise. Aujourd’hui, les communautés chrétiennes, les petits relais d’Eglise des paroisses rurales, forts du testament laissé par leurs anciens pasteurs, doivent continuer de donner le témoignage d’une foi qui se dit au delà de la mort. Tous, puissions-nous dire un jour : "Nous voyons maintenant !"

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Michel AMALRIC

Prêtre du diocèse d’Albi, chargé de la communication.

Publié: 01/12/2009