Efficacité de la prière

Il est dit que Jésus a prié toute une nuit avant de choisir ses apôtres.

Sous quelle forme s’est faite cette prière ?

Nous avons un seul exemple de cette prière de Jésus, celle de Gethsémani, et elle m’a longtemps troublée (je vous l’ai déjà dit) et surtout je me suis demandé comment l’évangéliste en avait eu connaissance, puisque tout le monde dormait. Mais passons !

Cette prière, ce n’est pas un dialogue, c’est plutôt un monologue angoissé. Or, il est dit dans la Bible que Moïse conversait avec Dieu comme avec un ami ; alors j’ai pensé naturellement que Jésus conversait avec son Père très librement.

Comment cette conversation s’était-elle déroulée entre Jésus et son Père au sujet du choix des apôtres ? Je ne me suis pas permis de l’imaginer en détail (et c’est heureux puisque je me trompais complètement).
Mais par contre, ce que je sais, c’est qu’après cette très longue prière, Jésus a fait son choix ; et son choix m’a laissée perplexe. La plupart de ces hommes paraissent sympas, du moins le peu qu’on sait d’eux. Mais ce ne sont pas des cracks ! Ça encore, ça peut s’expliquer, et même se justifier : il n’est pas nécessaire d’être bardé de diplômes, surdoué techniquement, physiquement ou sur le plan du caractère pour être appelé par Dieu, pour devenir un saint ou un meneur d’hommes. Mais au milieu d’eux, il y a Judas. C’est là que le bât blesse !

Car de deux choses l’une : ou Dieu le Père savait que Judas allait mal tourner et deux hypothèses s’offrent à l’esprit :
 première hypothèse : il l’a dit à son fils qui n’en a fait qu’à sa tête ;
 deuxième hypothèse : il n’a rien dit, et à quoi sert de converser si c’est pour ne rien dire.
Impensable dans les deux cas, à rejeter.

Ou alors Dieu le Père ne sait pas à l’avance, et il peut changer quand on l’implore, mais en ce cas, sa toute puissance aurait des limites ?

A rejeter également : ça ne tient pas debout.

Et voilà, avec ma petite logique j’arrivais à une impasse. Que faire ? Tout bêtement en parler à d’autres pour me renseigner, m’informer, me former. Et l’explication est venue.

Le mot conversation sur lequel j’avais bâti tout ce raisonnement était mal traduit ; il n’y a jamais eu naturellement de téléphone entre Dieu et Moïse, pas plus qu’entre Dieu le Père et Jésus.
Il faut se placer sur un autre plan : la prière ne fait pas changer Dieu, elle fait changer l’homme qui prie.

Et réfléchissez, quand on connaît vraiment quelqu’un, qu’on l’aime fortement, on arrive à deviner un peu ce qu’il pense, ce qui lui fait plaisir ou lui déplaît, comment il va réagir.

Quand un homme prie, il essaie de se glisser dans l’intimité de Dieu, il essaie par amour, de penser comme Dieu. Mais, en tant qu’homme, il ne peut pas savoir à l’avance ce qui va se passer.

Et Jésus était homme. Et pour en revenir à son choix sur Judas, nul doute que ce garçon au départ devait être capable de répondre aux attentes du Christ : il avait, entre autres, des qualités de gestionnaire. Et c’est pour cela qu’on lui avait confié la bourse.

Mais l’argent c’est tentant. Pauvre Judas qui n’a pas pu résister.

Et pauvre moi qui prends toujours les termes de l’Evangile ou de la Bible au premier degré avec ma petite logique cartésienne occidentale.

Heureusement, il y a des personnes qui peuvent vous éclairer (on n’est pas chrétien tout seul). Encore faut-il aller les trouver, on peut ainsi se débarrasser d’objections non fondées, irritantes et basées uniquement sur un mot mal traduit.

Ça m’arrive plus souvent qu’à mon tour, pas vous ?

Une faute d'orthographe, une erreur, un problème ?   
 
Françoise REYNÈS

Laïque mariste († 2011).

Publié: 30/11/2002