L’Eglise catholique a-t-elle changé ?

Il n’y a rien de plus terrible, dans le dialogue entre catholiques et protestants, que les stéréotypes séculaires que l’on se sert aimablement pour bien prouver que l’on a raison d’être ce que l’on est et, surtout, de ne pas chercher une nouvelle relation à l’autre. A tour de rôle, on se lance des accusations de " papôlatrie " ou de " libre examen". Parmi les images que les protestants se font des catholiques, il y a celle d’une Eglise Romaine qui n’aurait pas réellement changé depuis le XVIè siècle et qui cacherait derrière un discours " fraternel ", des convictions qui demeurent inacceptables au regard du " pur Evangile".

Que le discours catholique ait évolué, il suffit de juxtaposer deux textes concernant justement la démarche oecuménique. En 1949, il y a juste cinquante ans, le Saint-Office publiait une isntruction sur le " Mouvement oecuménique" qui se situait pleinement dans la perspective du " retour" des " dissidents" à " l’unique Eglise du Christ". Elle demandait d’écarter l’opinion erronée selon laquelle " l’Eglise catholique peut être perfectionnée par les autres Eglises ". Or, que lisons-nous dans la prtemière encyclique de l’histoire catholique sur l’oecuménisme, Ut unum sint (1985) ? " J’écoute, écrit Jean-Paul II, la requête qui m’est adressée de trouver une forme d’exercice de la primauté ouverte à unse situation nouvelle" (n° 95). Et le Pape demande l’aide des responsables et des théologiens des autres Eglises " pour instaurer sur ce sujet un dialogue fraternel et patient" (n° 96). N’est-ce pas la recherche d’un " perfectionnement" ?

Au-delà du changement de problématique, les protestants sont peut-être à se rendre compte que cela même qui leur hérisse le poil est ce qui garantit l’évolution du catholicisme, à savoir le sens de l’Eglise. Le catholique a un attachement filial à l’Eglise, une sorte de confiance spontannée à l’Eglise, et le protestent aimerait que cette relation soit plus imédiatement critique, plus distanciée. Mais ce positionnement de l’Eglise, au carrefour de tous les actes de foi, est aussi ce qui permet au catholique individuel de ne jamais surrestimer ses opinions personnelles, de s’intégrer à un ensemble plus large, à une exprience séculaire. Et l’histoire d’un corps comme l’Eglise ne procède pas par ruptures,mais par glissements, par déplacements. Les francs-tireurs se sentnet obligés au souci de ceux qui sont derrière. Car pour cette Eglise, la communion visible est un élément non négligeable du témoignage de l’Evangile.

Dans cette même logique, où la cohérence du corps dit quelque chose de la vérité de l’Evangile, la parole d’Yves Congar (en 1947 !) est toiujours éclairante : " L’Eglise catholique aime éprouver les choses avant de les approuver." On peut légitimement estimer que les évolutions souhaitées, qu’elles soient théologiques, éthiques ou oecuméniques, tardent, rencontrent des blocages inadmissibles, du fait notamment d’une valorisation excessive de la dimension personnelle de l’autorité.

Mais, s’il a fallu trente ans de travail plus ou moins souterrain et à contre-courant pour que Vatican II ait lieu et soit ce qu’il a été, on peut imaginer sans peine que seul un investissement de longue haleine, nourri de foi et d’intelligence, stimulé par un vrai dialogue avec les autres, permettar à l’Eglise catholique de franchir une nouvelle étape. Nul catholique ne doute que des positions changerint sur tel ou tel point, car il sait que son Eglise a plutôt une conception évolutive de l’histoire, même si l’opération prend du temps. Le catholique d’aujourd’hui a, dans ses gênes, ce mélange d’optimisme et de patience, mêmes ’il s’en défend.

Au seuil du nouveau siècle, catholiques et protestants auraient intérêt à relire les propos du pasteur Tommy Fallot à son ami l’abbé Rirot, vicaire général d’Alby, en 1894 : " Le jour où les protestants comprendront tout ce qu’ils peuvent acquérir au contact des catholiques, le jour où les catholiques(...) comprendront que le protestantisme est autre chose qu’une négation de la foi catholique, ce jour-là, les coeurs chercheront les coeurs, et les anges se prépareront à entonner l’hymne de la pacification dans la charité et la vérité reconquise. "

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Bruno CHENU a.a.

Co-président catholique du Groupe des Dombes

Publié: 30/10/1999
Les escales d'Olivier