Le Temps - Édition de mars
Ce matin, Jésus s’est mis en marche vers Béthanie non loin de Jérusalem. A ses disciples il a dit, parlant de Lazare qui venait de mourir, qu’il allait le réveiller.
La troupe, à son arrivée dans le bourg, a appris que Lazare avait été enseveli quatre jours auparavant. En s’approchant de la demeure de Marthe et Marie, les sœurs de Lazare, Jésus a pu constater qu’elle débordait de monde, d’amis, de proches venus apporter leur consolation. Aussi s’arrêta-t-il un instant. Il était encore en haut de la rue que Marthe, avertie de sa venue, l’a rejoint, laissant Marie assise à terre en signe de deuil. Et, s’adressant à Jésus, elle a dit que s’il avait été présent, son frère ne serait pas mort. Alors, se penchant vers elle, celui-ci a promis que Lazare se lèverait. Comme il disait cela, Marthe est allée prévenir Marie. Secouant sa torpeur, la plus jeune des sœurs s’est à son tour précipitée au devant de Jésus. En larmes, accompagnée des visiteurs qui pensaient qu’elle se rendait au sépulcre, elle s’est immobilisée face à celui qu’elle appelle Maître et lui a dit que s’il avait été présent son frère ne serait pas mort. Et Jésus a été troublé par les paroles et par les pleurs. Emu jusqu’au fond de l’âme, il a demandé où avait été placée la dépouille de son ami. On l’a conduit hors de la ville, à une grotte fermée d’une pierre. Et là, proche du tombeau, Jésus a demandé que l’on déplaçât la pierre. Marthe a bien objecté que le corps s’était probablement déjà corrompu, il fut fait comme il l’avait voulu. Alors, après une brève prière, il a ordonné à Lazare de se lever et de sortir. A l’étonnement général, on a vu apparaître, hors du caveau, une silhouette aux pieds et aux mains liés de bandelettes et au visage enveloppé d’un suaire. Se tournant vers l’assemblée Jésus a fait signe qu’on le déliât et le laissât aller.
Les nombreux Juifs qui s’installent dans la Ville Éternelle ne tardent pas à constater qu’un monde sépare la mode de Rome de celle de Jérusalem, et qu’elle est source de grandes difficultés. Soit ils adoptent l’allure romaine et endurent les sarcasmes devant leur aspect déguisé. Soit ils gardent leur vêtement traditionnel et endurent le mépris des nobles et des chevaliers romains qui les confondent avec des affranchis. La plus pénible des inventions romaines est sans nul doute le rasage, qui stupéfie et outrage tous les peuples des provinces, de la Gaule à la Palestine. Installés en plein vent ou dans une petite boutique, les barbiers ne se contentent pas de raser barbes et moustaches, ils coupent courts les cheveux, que les hommes les plus frivoles se font, en plus, friser au fer.
De toutes les provinces où sont allés les Romains, ils ont ramené de nouveaux vêtements qu’ils préfèrent systématiquement à leur toge. De Grèce ils ont copié le pallium des philosophes, grande bande de tissu de laine qu’on passe sur une épaule puis qu’on enroule autour des reins. Le pallium est plus facile à plisser que la toge, même si, par contrecoup, la gestuelle romaine perd de sa retenue. De la Gaule Cisalpine ils ont ramené la poenula, grand manteau surmonté d’un capuchon, qu’on porte directement sur la tunique, fait
Le Temple constitue le centre spirituel et politique d’Israël. Ce Temple édifié par Salomon et une première fois détruit a été reconstruit. Les travaux en ont été entrepris par Hérode il y a vingt ans de cela. Si le sanctuaire lui-même a été rebâti en moins de deux ans, les travaux d’ensemble viennent tout juste d’être achevés. Avec ses pierres blanches, dont certaines pèsent plusieurs tonnes et ses toits dorés, le Temple est certainement l’un des bâtiments les plus imposants de tout l’Empire.
Jésus a, par exemple, expliqué aux foules : "Si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux.", appel à la rébellion martelé à plusieurs reprises : "Méfiez-vous du levain des pharisiens et des sadducéens." Il s’est même permis de rabrouer ceux qui sont venus lui demander les preuves de ce qu’il avance : "Génération mauvaise et adultère." Ou encore, citant Isaïe : "Ce peuple m’honore des lèvres, mais leur coeur est loin de moi. Vain est le culte qu’ils me rendent : les doctrines qu’ils enseignent ne sont que préceptes humains." Amos le sacrilège aurait pu en dire autant.
Récemment encore, on l’a entendu s’en prendre publiquement aux scribes : "Gardez-vous d’eux, qui se plaisent à circuler en longues robes, à recevoir les salutations sur les places publiques, à occuper les premiers sièges dans les synagogues et les premiers divans dans les festins, qui dévorent les biens des veuves et affectionnent défaire de longues prières. Ils subiront, ceux-là, une condamnation plus sévère."
La volée continue de gifles verbales a poussé les prêtres et les scribes à envisager d’un œil
Celui-ci, rappelons-le, a choisi les plus crédules pour asseoir son message. Les guérisseurs sont légion en ces temps troubles, mais lui semble avoir multiplié les prodiges pour s’attirer la sympathie de ceux qui le suivent : aveugles, lépreux, possédés, paralytiques, jusqu’à l’enfant du centurion romain. Il s’est permis de soulager les souffrances humaines tout en remettant les péchés. Il a agi le jour de sabbat ; il aurait marché sur les eaux, apaisé une tempête. Il aurait joué, tour à tour, au nouveau Moïse, au fils de Dieu, au maître du Temple.
L’audience rencontrée par ce prophète pourrait ne pas troubler la quiétude des prêtres si ne s’y glissaient d’inadmissibles éléments séditieux.
En vrac. Jésus ne se prive pas de prendre place à la table des impurs. Il y a quelques jours encore, à Jéricho, a partagé le repas de Zachée, chef des publicains. Il a séjourné chez les Samaritains, a dialogué avec des femmes, pas toujours de grande vertu, les a autorisées à le suivre.
Le réquisitoire s’est alourdi avec la "résurrection" de Lazare, à Béthanie. A proximité de Jérusalem, un mort s’est levé sur une injonction de Jésus. Aux portes de la cité il a accompli son miracle le plus spectaculaire. Des témoins sont venus se confier aux pharisiens. Les têtes se détournent du Temple pour guetter l’arrivée du Nazaréen pour les fêtes de la Pâque. Il semble bien que l’avis de recherche lancé par les religieux sur le territoire de Judée ne l’ait pas dissuadé de se rendre dans la ville sainte pour la Pâque.
L’autre soir, les pharisiens et les grands prêtres se sont réunis avec la ferme intention de régler l’affaire Jésus. Deux attitudes les ont d’abord divisés.
Les premiers ont eu peur des Romains. Laisser la croyance en Jésus prospérer, cela signifie, à plus ou moins longue échéance, des troubles généralisés, un
Comme Pâque, la fête des Azymes est prévue pour bientôt, les prêtres et les scribes, qui n’ont toujours pas trouvé le moyen de perdre définitivement Jésus, sont dans l’embarras. Ils ne peuvent ni ne veulent qu’il soit arrêté durant les fêtes saintes. Ils craignent les réactions du peuple.
C’est alors que Judas, l’un des Douze, est venu contacter les officiers commandant la garde du sanctuaire et leur offrir un marché. Après s’être concerté avec eux, il a convenu, contre rétribution, de leur livrer Jésus en les avertissant lorsque celui-ci se trouverait à l’écart de la foule. Le pacte passé, Judas s’en est retourné auprès de ses compagnons.
Evêque émérite de Gap et d’Embrun.
Fondateur du groupe de chanteurs "Les Prêtres".
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