Galilée Matin - Édition de juillet/août


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Des pains miraculeux
Une rétrospective des évènements majeurs de l’année
Le Nazaréen vient de réaliser un nouveau prodige particulièrement spectaculaire. Il a multiplié des couronnes de pain. Le nom de Jésus court sur des lèvres de plus en plus nombreuses. Chaque jour les prodiges qu’il accomplit sont répercutés de ville en ville. Le Nazaréen vient de réaliser l’un de ces actes magiques qui embrasent les esprits de la province. Les apôtres, qui l’accompagnent dans tous ses déplacements, ont donné des signes de fatigue. La population se presse sans interruption devant les lieux où leur maître dispense sa parole. Jésus s’est ému de l’épuisement de ses disciples, qui depuis plusieurs jours ont à peine pris le temps de se restaurer. Ils ont décidé de s’éclipser, d’échapper un moment aux foules pour goûter un repos bien mérité. En barque ils ont traversé la mer de Tibériade en direction de Génésareth. Peine perdue. Sur le rivage les attendait une masse de gens, issus en grande partie des classes les plus pauvres. Un aréopage de malades convaincus d’être guéris au premier regard du Nazaréen, des publicains, des miséreux et, nous a-t-on rapporté, quelques Samaritains.
Visages désemparés

Jésus et les siens ont échangé un regard. Les visages qui se sont tournés vers eux apparaissaient aussi désemparés que les têtes de brebis sans pasteur. Prenant pitié, Jésus leur a demandé de s’installer dans l’herbe haute et pendant de longues heures leur a répété le message qu’il transmet depuis son baptême dans le Jourdain. Paraboles, commentaires de la Loi, mots prononcés au nom de Dieu se sont succédé. L’assistance a écouté avec le recueillement habituel.
À la tombée du jour, l’inquiétude a commencé à se manifester. Personne n’avait prévu de nourriture. Les proches du Fils de l’homme lui ont suggéré de renvoyer les cinq mille hommes rassemblés à ses pieds, auxquels s’ajoutent des femmes et des enfants. Jésus a refusé et a conseillé à tous de s’allonger tranquillement par groupe de cinquante ou de cent. Les seules denrées disponibles en cet endroit éloigné des agglomérations en ont fait sourire plus d’un : cinq pains d’orge et deux poissons apportés par un enfant.

Jésus a pris les cinq pains. Son regard s’est tourné vers le ciel. Il a prononcé une bénédiction. Puis il a demandé à ses disciples de rompre les couronnes de pain. Il a pratiqué de la même façon avec les deux poissons. Plus ses amis distribuaient les vivres, plus la quantité apparaissait suffisante. Au final, le Nazaréen a demandé, comme l’exige la Loi, que l’on ramasse les restes et les miettes. Le surplus a rempli douze couffins. En cette approche de la Pâque, ce nouveau prodige a servi un peu plus la réputation flatteuse de Jésus. La nouvelle de la multiplication des aliments est remontée jusqu’au temple. Les prêtres sont sceptiques. Ils hésitent. Quelle interprétation donner à cette série d’événements. Blasphème, usurpation, escroquerie. D’autant que Jésus a lancé cet avertissement : "Méfiez-vous du levain des pharisiens et des sadducéens !" Attaque directe des enseignements des uns et des autres. Ceux qui suivent Jésus ont déjà compris que le fils de Dieu est parmi eux. Les plus enthousiastes l’ont même pris pour le futur roi des Juifs, le nouveau David.
 
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Des pains miraculeux
La terre s’est montrée généreuse. Blé, fruits, légumes couvrent Israël.

Les agriculteurs - une fois n’est pas coutume - se frottent les mains. L’abondance des récoltes ne fera pas mentir la réputation d’opulence agricole de la Galilée. Le blé pourra nourrir la province et répondre aux besoins croissants de Jérusalem, spécialement aux moments des fêtes, lorsque la ville est envahie par les pèlerins. Le Temple exige les meilleures qualités de blé pour les gerbes des prémices, les pains de proposition ou les offrandes volontaires. Cette année encore, Mikmas, Zanoah et Hapharaïum, les trois villages

de Judée, sont en mesure de fournir une récolte de très haute qualité. Certains voyageurs regretteront toujours qu’on ne puisse utiliser l’excellente production de Capharnaüm. Faut-il leur rappeler que ce blé-là doit traverser la Samarie, devenant impur du même coup ? En raison de cette générosité naturelle, l’orge n’aura pas à remplacer le blé pour la fabrication du pain, comme c’est l’usage en cas de disette. Elle engraissera les animaux et sa farine continuera d’être utilisée par les plus pauvres. Rome peut se réjouir ; Israël est en mesure d’exporter vers le siège de l’empire ses figues, si prisées. Quant aux Égyptiens et aux Syriens, ils pourront
accommoder leur cuisine avec l’huile d’olive de nos contrées. Le Temple pourra presser dans son enceinte les olives de Pérée. Elles restent les plus belles, rondes, douces et lisses. La vigne ne s’est pas montrée avare. La consommation d’Israël, toujours aussi prodigieuse, n’aura pas à en souffrir, et certains crus de Judée ont déjà pris la mer pour régaler de lointains palais. Le pèlerin qui nous lit pourra vérifier que les fruits et les légumes abondent toujours à Jérusalem. L’empereur ne nous lit sans doute pas, mais peut-être aura-t-il une pensée émue pour les grenades qui ornent quotidiennement sa table. Elles ont poussé sous nos cieux.
 
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Gastronomie : le garum

Le courrier de nombreux lecteurs témoigne de leur curiosité pour le garum, ce liquide noir utilisé dans la cuisine romaine. Nous publions aujourd’hui la recette de sa fabrication.
Acheter un tonneau de maquereaux et de thons frais, les ouvrir, et recueillir soigneusement les intestins courant depuis leur gorge jusqu’à la queue. Il est important de ne pas les rincer, ni à l’eau claire, ni à l’eau de mer, ils perdraient alors une grande partie de leurs humeurs.
Placer les organes recueillis dans une jarre de céramique propre, et recouvrir le tout d’une vingtaine de poignées de sel. Obturer la jarre d’un bouchon de liège hermétique, et laisser macérer pendant deux à trois mois au moins. Sous l’action du sel et des liquides digestifs, les organes des poissons vont se liquéfier. Plus le temps de macération sera long, plus grande en sera la qualité.
Quelques gouttes de garum, d’usage commode en voyage puisqu’il évite de se charger de sel, donnent un goût raffiné aux légumes frais et cuits, aux viandes, aux volailles ou aux tranches de pain. Pour ceux qui désirent en acheter, il est recommandé de se méfier des escrocs coupant le garum d’eau. Les meilleurs proviennent aujourd’hui des fabriques espagnoles.

Violent incendie à Rome

De notre correspondant permanent sur place

Un violent incendie a ravagé Rome pendant plusieurs jours. Tout le quartier de l’Aventin a été détruit par les flammes. Le vent a attisé les flammes d’une maison de bois à ’autre, sans que la milice de l’armée romaine spécialisée dans la lutte contre le feu puisse agir. En apprenant la nouvelle à Capri, où il s’est installé, Tibère a décidé d’allouer une somme de cent millions de sesterces aux victimes du sinistre.


 
 
Conversion d’Hélène d’Adiabène

Hélène, reine d’Adiabène, a choisi de se convertir à la religion juive ainsi que tous ses fils, qui ont réclamé la circoncision. Le porteur de la foi d’Abraham dans le royaume oriental a pour nom Ananias, qui n’est ni prêtre ni rabbin, mais marchand. Ananias avait accès au gynécée royal et convertit d’abord les femmes d’Izatès, fils aîné de la reine, puis Izatès lui-même. Secondé par un ami galiléen, Éléazar, Ananias a enfin converti la reine elle-même. La circoncision des princes, contrairement aux craintes de la famille royale, n’a pas soulevé la colère du peuple. Bien au contraire, nombreux sont ceux qui ont choisi de suivre leur reine, Hélène. En hommage aux princes d’Adiabène, un office sacrificiel aura lieu la semaine prochaine au Temple de Jérusalem.

 
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Jean-Michel DI FALCO

Evêque émérite de Gap et d’Embrun.
Fondateur du groupe de chanteurs "Les Prêtres".

Publié: 01/07/2021