Le baptême de l’eunuque (Ac 8, 26-40)
Nicolas Bertin (1668-1736) 1718, huile sur toile, 92 x 73 cm. Paris, musée du Louvre. L’œuvre définitive, en grand format, est conservée dans l’église St Germain des Prés.
Philippe fut envoyé sur la route de Gaza, à un eunuque, haut fonctionnaire de Candace, reine d’Ethiopie. Celui-ci, sur son char lisait le prophète Isaïe. En l’écoutant, Philippe lui demanda s’il comprenait le passage qu’il lisait. L’eunuque répondit qu’il avait besoin d’être guidé pour découvrir le sens de l’Ecriture et invita Philippe à s’asseoir avec lui. Il lisait alors ces versets : « Comme une brebis, il fut conduit à l’abattoir ; comme un agneau muet devant le tondeur, il n’ouvre pas la bouche. Dans son humiliation, il n’a pas obtenu justice. Sa descendance, qui en parlera ? Car sa vie est retranchée de la terre. » () A qui s’appliquent ces versets ? Qui annoncent-ils ? demande l’eunuque. Et Philippe, « à partir de ce passage, lui annonça la Bonne Nouvelle de Jésus ». L’eunuque demanda alors le baptême. C’est la scène que représente Nicolas Bertin.
Dans un décor de défilé rocheux quelque peu désertique, une impressionnante escorte se déploie à l’arrière plan : chevaux, chameaux, char somptueux, soldats en armes, serviteurs coiffés de plumes… le cortège est à la hauteur de la puissance de ce haut fonctionnaire. Mais celui-ci a quitté son char et sa suite. Nous dirions aujourd’hui « qu’il a quitté sa zone de confort ». En agissant ainsi, il manifeste que l’échange avec Philippe lui a permis de comprendre qui est le Christ, manifesté aux hommes dans l’humilité de la condition humaine, « ne retenant pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu » ()
Le livre des Actes, et Nicolas Bertin à sa suite, déploient une véritable catéchèse baptismale : tout a commencé en ouvrant le livre, que l’eunuque a posé sur un rocher devant lui. Il s’est alors aperçu qu’il ne pouvait cheminer seul dans la compréhension de l’Ecriture. Philippe lui est envoyé par le Seigneur comme le nécessaire compagnon, témoin de la foi en Jésus.
Délaissant alors les prérogatives de son rang, il l’invite à s’asseoir auprès de lui.
Alors, parce que l’Ecriture a pris sens et vie pour lui, le baptême devient possible. Pour le recevoir et le vivre, l’eunuque nous montre le chemin : il faut se dépouiller. Quitter les soies et les plumes de notre orgueil et nos défenses bien armées. Se reconnaître vêtu et pétri de terre, fils d’Adam, modelé par Dieu à l’aube de la Création, et criant vers Dieu son besoin d’être sauvé.
Alors, dans l’eau du baptême, nous recevons la robe nuptiale, éclatante de blancheur. Alors le ciel vers lequel Philippe se tourne s’ouvre dans notre vie.
Dans le désert, des palmiers pleins de vie s’agitent avec souplesse. La vie du baptisé est transformée, vivifiée, assouplie, sauvée par l’œuvre de l’Esprit.
Prêtre du diocèse de Cambrai, responsable de la Commission d’art sacré.
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