6e dimanche ordinaire

1. On recense actuellement 3 millions personnes atteintes de la lèpre et près de 200 000 nouveaux cas par an, essentiellement au Brésil, en Afrique, en Inde et dans les pays asiatiques. Elle a toujours été considérée comme une malédiction des dieux. Contagieuse, elle obligeait à se tenir à distance ; la première lecture en détaille toutes les obligations au temps de Jésus. Malgré les interdits, cet homme s’approche pourtant de Jésus. Savait-il que cet homme-là faisait bon accueil aux pécheurs ? « Si tu veux, tu peux me purifier ! » Jésus en fut touché, « pris de pitié » dit le récit. Un sentiment très humain qui nous dit combien Jésus nous était proche, qu’il partageait la peine et la souffrance de cet homme. Alors il a fait ce qu’il a pu : en le touchant, il lui rend la santé. Et bien plus encore : la dignité, le retour dans la société et à n’en pas douter une immense reconnaissance envers celui qui l’avait guéri et s’apprêtait à répandre cette bonne nouvelle.

2. « Si tu le veux, tu peux me purifier. » Cet homme montre tout à la fois une grande audace en s’approchant et une respectueuse déférence. On sent un grand respect derrière ce « S’il te plaît ». Pas d’exigence mais une humble demande. Tel devrait être l’esprit de notre prière. Au lieu de quoi nous pouvons être pris de reproches. Ce fut celui de Job, ce lépreux d’un conte écrit un siècle plus tôt. Job avait dans un premier temps accepté les épreuves que l’Adversaire avait demandé à Dieu de lui infliger pour éprouver sa foi il lui avait répondu : « Nous acceptons le bonheur comme un don de Dieu. Et le malheur comment ne l’accepterions-nous pas ? » Mais bientôt il se mit à plaindre, et regretter d’être né, dit avoir honte d’avoir eu confiance. Il prend alors Dieu à parti : « Pourquoi m’avoir pris pour cible ? »

3. Jésus insiste sur la nécessité de la prière. « Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. » Avec l’insistance celui qui vient demander du pain de nuit à son ami qui finit par se lever pour le servir. En effet, « quiconque demande reçoit, qui cherche trouve, à qui frappe on ouvrira. » Cependant il nous faut reconnaître que nos demandes semblent ne pas avoir été entendues comme nous le souhaitons malgré notre insistance. Notre prière ne serait-elle pas celle que le Seigneur attend de nous ? Il nous faut regarder comment Jésus priait.

4. On sait qu’il priait souvent, souvent de nuit, à l’écart. Il prie à son baptême, au commencement de sa mission, lors de l’institution des Douze, lors de la transfiguration. Comment priait-il ? Que disait-il dans sa prière ? On ne sait pas. Sauf ce soir-là, au jardin des oliviers, au moment le plus dramatique de sa vie : « Mon Père, s’il est possible, que cette coupe passe loin de moi ! Pourtant, non pas comme je veux mais comme tu veux. » Non pas « si tu veux » mais « comme tu veux. » C’est dans ce comme qu’il nous faut chercher la manière de prier. L’évangéliste Jean, qui parle peu de la prière de Jésus, ne cesse de dire qu’il fut en communion permanente avec le Père. Que c’était cela sa prière. Que ce qui lui importe c’est faire ce que le Père lui demande, comme le Père le lui demande. Pour que son règne vienne et non pas le nôtre. Oui, nous pouvons et devons prier dans les épreuves. Non pas tant pour qu’elles passent loin de nous mais pour demander la force qui permet de les traverser sans perdre pied. La manière dont nous les vivrons peut aider comme décourager ceux qui nous regardent. Edith Stein, philosophe juive devenue Carmélite, morte à Auschwitz, raconte que sa conversion commença lorsqu’elle vit comment son amie vécut la perte de son mari au front en 14-18.

5. On s’étonne que Jésus ait demandé à celui qu’il vient de guérir de n’en parler à personne. Plusieurs de ceux qu’il avait guéris entendront la même injonction. On a dénommé cela le secret messianique. Les disciples comprendront plus tard, après la résurrection, que Jésus était venu pour une autre mission que celle de la guérison des corps. Que c’était le cœur de l’homme qu’il fallait guérir et que cela ne dépendait pas seulement de lui mais d’un chacun.


Méditation

« Si tu veux, Seigneur, si tu veux ! »
C’est comme cela qu’il t’avait prié,
Cet homme que la lèpre a défiguré.
Il savait pourtant que toi tu peux.

Dans ton regard il avait lu
Et sur ton visage il avait vu
Qu’il ne t’était pas si hideux
Mais tellement malheureux.

Tellement facile de ne rien voir.
Tellement facile de ne rien savoir !
Me font tenir à distance
De ceux qui me prient en silence.

Que ceux qui m’approcheront
Ne voient que de l’attention
Y trouvant, divine surprise,
Celle que tu m’auras apprise.

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 11/02/2024