2e dimanche de Carême

1. A la question de Jésus : « Au dire des hommes, qui est le Fils de l’homme ? », Pierre répond au nom de tous : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! » « A partir de ce moment-là, poursuit le récit, Jésus commença à montrer à ses disciples qu’il lui fallait aller à Jérusalem, souffrir beaucoup, être mis à mort et le troisième jour ressusciter. » Pierre proteste : comment « le Fils du Dieu vivant » peut-il être mis à mort ? Alors vient le mystérieux récit de la transfiguration, que l’on peut lire en parallèle avec des événements de l’Exode au temps de Moïse.

2. Il faut dépasser l’aspect « merveilleux » du récit pour en découvrir le sens. La montagne, qu’on a identifiée depuis le 4e siècle avec le mont Thabor, est le lieu traditionnel des théophanies. Moïse et Elie y conversèrent avec Dieu. Dans la mémoire juive, ils représentaient la Loi et les Prophètes, soit le fondement même de la foi dont il ne fallait rien soustraire, ni rien ajouter. Ce que les scribes et les pharisiens qui s’en disaient les gardiens reprochaient à Jésus. Moïse et Elie conversant avec Jésus confirment aux disciples qu’il en est l’accomplissement comme il l’expliquera à ceux de la route d’Emmaüs.

3. La nuée lumineuse évoque celle la présence divine qui couvrait la « tente de la rencontre » et s’élevait pour guider le peuple hébreu en marche dans le désert vers la terre promise. Jésus, au visage et aux habits de lumière, est désormais leur nouveau guide : « Ecoutez-le ! » D’entendre cela saisit les disciples et ils se prosternent dans une grande crainte. Tout comme Moïse qui dut se voiler la face lorsqu’il entendit une voix qui venait du buisson ardent : « Je suis le Dieu de ton Père, Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob », « car il craignait de regarder Dieu ». Mais ils entendirent aussitôt : « Relevez-vous et soyez sans crainte ! » Comme les onze qui, « effrayés et remplis de crainte » lorsque le Seigneur parut au milieu d’eux au soir du jour de la résurrection, entendirent : « La paix soit avec vous. » Jésus ne cessera de parler de son Père autrement que de celui dont il se dit être le porteur de la douceur et de la miséricorde.

4. Cet événement est à mettre en relation avec la résurrection qu’il annonce comme Jésus leur suggère lui-même en descendant de la montagne. Les mêmes disciples, Pierre, Jacques et Jean, qui viennent d’assister à la manifestation de la « gloire » du Christ, assisteront aussi à sa prière de déréliction au jardin des Oliviers. Mais Pierre et Jean seront les premiers d’entre eux à se rendre au tombeau. L’événement glorieux signifie que la mort n’aura pas le dernier mot. Il est donc signe d’espérance.

5. Notre temps, notre présent personnel nous donnent bien des signes de son contraire. « Tout paraît extraordinairement fragile, à la merci d’un nouveau conflit peut-être nucléaire ou bactériologique, de l’un ou l’autre accident technologique majeur (d’autres Tchernobyl), d’un crash financier, d’une paralysie des systèmes informatiques de contrôle de l’énergie ou des fonctionnements économiques et administratifs suite à un acte de malveillance, d’une prise de contrôle grandissante des économies et de la finance mondiale par les mafias, d’un environnement peu à peu totalement dégradé menaçant la survie de l’humanité. » (Père Jean-Louis Souletie). Contre la peur et le découragement que tout cela engendre, Anne Lécu, religieuse dominicaine et médecin à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis, écrit sous le titre « L’espérance chrétienne est une décision, pas un sentiment » : « L’espérance chrétienne est celle de ces femmes de l’Évangile qui, de grand matin, sont allées au tombeau pour embaumer celui qu’elles ont aimé et qui a été assassiné. Pourtant elles se sont levées, elles sont sorties de chez elles, elles ont pris du parfum, et elles sont là… Espérer, c’est chaque matin, donner quelque chose de son temps, son ingéniosité, son amitié. » Alors nous serons aussi de ces trois de la montagne du Thabor.

Sur cette colline, dont ils firent une montagne,
Tu leur as montré, Seigneur, la face cachée
De la splendeur que, de ton Père, tu tenais.
Et ils ne voulurent plus de leurs campagnes.

Ils ne savaient pas que, transfiguré ce jour,
Il serait défiguré dans une arrière-cour.
Ils ne savaient pas que deux pauvres larrons
Lui seraient donnés pour seuls compagnons.

Seigneur, que tes chemins sont difficiles à suivre
Nous aurions aimé moins de meurtrissures
Mais tu as voulu nous montrer le comment vivre
Lorsque viendront les épreuves qui défigurent

Faire silence et laisser les mots se taire
Lever les yeux et l’âme en prière
Vers celui qui, les bras écartés,
Mourut le cœur d’amour tout navré.

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Aloyse SCHAFF

Capitaine de Port Saint Nicolas.
Prêtre du diocèse de Metz. Fut professeur de sciences physiques et directeur du lycée Saint-Augustin à Bitche (57).
Activités pastorales dans les communautés de paroisses du Bitcherland.
Animation d’ateliers d’information et de réflexion sur les textes bibliques et l’histoire chrétienne : Pères de l’Eglise, fondateurs des grands ordres religieux, les grands papes, les grands saints du Moyen-Âge, du XVIe siècle. Des présentations à découvrir sur le site.

Publié: 05/03/2023