Nouvelles d’Israël - Édition de février
Jésus a ressuscité son ami Lazare, mort depuis quatre jours.
Les prodiges du Nazaréen prennent une proportion qui inquiète Caïphe et ses prêtres. Leurs agents, ou simplement des sadducéens qui ont croisé la route de Jésus, leur rapportent les guérisons multiples dont il est l’auteur. Le dernier exploit du prêcheur de Galilée dépasse les imaginations. Il prend même à rebrousse-poil les convictions profondes de Caïphe, qui ne reconnaît pas de vie après la mort.
C’est bien de mort dont il s’agit. Une mort brève. Celle de Lazare de Béthanie, un ami de Jésus. Le Lazare en question a passé quatre jours dans le tombeau, raide comme un Maccabée. Jésus l’en a sorti. La vie est revenue dans ce corps meurtri par la maladie et la fin. De nombreux riverains ont assisté à la scène miraculeuse. Désireux d’obtenir la reconnaissance des pharisiens et du grand prêtre, ils se sont dépêchés de rapporter l’histoire.
Celle-ci ressemble à un lumineux témoignage d’amour. Le fils du charpentier est retourné en Galilée, du côté de Salim. Les menaces de lapidation lancées contre lui par des habitants de Judée manipulés par les sadducéens l’ont poussé à se faire plus discret. Un messager l’a tiré de sa retraite.
Marie et Marthe, les sœurs de Lazare, l’ont envoyé chercher. Leur frère est malade. Ses forces le quittent. Il s’affaiblit de jour en jour. Jésus a accueilli la nouvelle sans sourciller. Il n’a pas bougé pendant deux jours. Un matin il s’est levé. Il a tendu la main vers son manteau et son bâton. Il avait déjà noué sa ceinture : "Allons de nouveau en Judée." Ses disciples ont vainement tenté de le mettre en garde contre les risques qu’il courait en retournant dans la province de Jérusalem. La décision de leur maître s’appuyait manifestement sur un impératif inconcevable : "Lazare est mort, et je me réjouis pour vous de n’avoir pas été là-bas, afin que vous croyiez. Mais allons auprès de lui !"
A son arrivée, Lazare dormait au tombeau, grotte fermée d’une pierre plate. La maison était pleine de monde. Marie, Marthe, la famille, les amis, des connaissances de Jérusalem, distante de quelques stades. Tout ce monde était plongé dans une grande affliction. Les joues étaient brillantes de pleurs.
Jésus s’est dirigé vers le tombeau. Lazare, embrassé avec affection, lavé, frotté d’aromates et de parfums, le visage enveloppé d’un suaire, les mains et les pieds prisonniers de bandelettes, y avait été descendu depuis quatre jours. Marie s’est jetée aux pieds de l’ami de sa famille : "Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort." Les larmes ont inondé le visage de la femme, elles ont coulé sur ceux de l’assistance.
Le Nazaréen, si solide, si maître de ses nerfs, est apparu troublé. Ce contact avec la mort d’un ami n’évoquait-il pas sa propre fin, qu’il annonce prochaine, se sont interrogés des disciples. Jésus a frémi. Il a pleuré à son tour. Il a ordonné qu’on déplace la pierre de la sépulture.
Marthe s’est inquiétée : "Il pue déjà." Le Christ a insisté. L’ouverture a été dégagée. Levant les yeux, Jésus s’est adressé aux cieux. Des paroles d’une puissance inouïe : "Père, je te rends grâces de m’avoir écouté. C’est à cause de la foule qui m’entoure que j’ai parlé, afin qu’ils croient que tu m’as envoyé." Le silence s’est fait plus compact. Et d’une voix forte, il s’est écrié : "Lazare, viens dehors !" Le mort, avec des gestes mécaniques, s’est levé. Beaucoup sont tombés à terre pour louer ce miracle. Débarrassé des tissus mortuaires, Lazare s’en est allé vers sa maison.
On murmure, dans l’entourage des puissants du temple, que Caïphe a déjà condamné à mort Jésus. Lazare aussi devrait subir le même sort. Son retour parmi les vivants représente une preuve bien trop encombrante des pouvoirs du Nazaréen, dont on a perdu la trace à la sortie de Béthanie. Osera-t-il venir à Jérusalem pour la Pâque ? En tous cas, il y est attendu de pied ferme.
Ce matin, Jésus s’est mis en marche vers Béthanie non loin de Jérusalem. A ses disciples il a dit, parlant de Lazare qui venait de mourir, qu’il allait le réveiller.
La troupe, à son arrivée dans le bourg, a appris que Lazare avait été enseveli quatre jours auparavant. En s’approchant de la demeure de Marthe et Marie, les sœurs de Lazare, Jésus a pu constater qu’elle débordait de monde, d’amis, de proches venus apporter leur consolation. Aussi s’arrêta-t-il un instant. Il était encore en haut de la rue que Marthe, avertie de sa venue, l’a rejoint, laissant Marie assise à terre en signe de deuil. Et, s’adressant à Jésus, elle a dit que s’il avait été présent, son frère ne serait pas mort. Alors, se penchant vers elle, celui-ci a promis que Lazare se lèverait. Comme il disait cela, Marthe est allée prévenir Marie. Secouant sa torpeur, la plus jeune des sœurs s’est à son tour précipitée au devant de Jésus. En larmes, accompagnée des visiteurs qui pensaient qu’elle se rendait au sépulcre, elle s’est immobilisée face à celui qu’elle appelle Maître et lui a dit que s’il avait été présent son frère ne serait pas mort. Et Jésus a été troublé par les paroles et par les pleurs. Emu jusqu’au fond de l’âme, il a demandé où avait été placée la dépouille de son ami. On l’a conduit hors de la ville, à une grotte fermée d’une pierre. Et là, proche du tombeau, Jésus a demandé que l’on déplaçât la pierre. Marthe a bien objecté que le corps s’était probablement déjà corrompu, il fut fait comme il l’avait voulu. Alors, après une brève prière, il a ordonné à Lazare de se lever et de sortir. A l’étonnement général, on a vu apparaître, hors du caveau, une silhouette aux pieds et aux mains liés de bandelettes et au visage enveloppé d’un suaire. Se tournant vers l’assemblée Jésus a fait signe qu’on le déliât et le laissât aller.
A Rome, la mort n’est pas rejetée dans l’ombre glacée. Les caveaux des défunts sont souvent des monuments (voir illustration en bas) qui perpétuent leur mémoire. Autels, sépultures de marbre, cippes et édiles s’alignent dans les nécropoles, environnés de vergers et de jardins fleuris qui accueillent le soleil.
Dans l’Empire, les morts sont incinérés plutôt qu’inhumés, contrairement à ce qui se pratique en Judée où les mains et les pieds sont enveloppés de bandes qui les maintiennent et le corps recouvert d’un suaire, le soudarion.
Nouvelles d’Israël publie, comme chaque année, le bilan des importations à Jérusalem.
Du Liban, cèdres, pour la noblesse de leur bois.
D’Arabie, encens, toujours aussi coûteux. Plusieurs caravanes ont également amené des quantités notables de fer, de cuivre et d’or.
D’Inde et de Babylone, les tissus que les prêtres continuent de préférer à ceux de Galilée, le byssus, l’écarlate et la pourpre. De Babylone on signale aussi une caravane de deux cents chameaux, chacun portant trois cent kilos de poivre.
De Corinthe, le bronze et le marbre, que l’on continue d’employer pour les travaux de finition du Temple.
D’Egypte, principalement les béliers, qui mangent l’herbe sans donner de lait ni porter de petits, que l’on achète pour les sacrifices et les holocaustes.
Le prix de la myrrhe flambe, depuis que les Romains et les Grecs en achètent pour leurs temples. Le Temple demande à tous les Juifs d’augmenter leur obole, pour subvenir à l’achat des bâtons aux caravanes d’Arabie. La gomme résineuse coule de l’arbre épineux d’Egypte, au tronc dur et à l’écorce lisse et plie comme celle de l’arbousier. On l’incise deux fois chaque année, et la liqueur recueillie est jetée à sécher sur des claies de joncs. La myrrhe de bonne qualité est reconnaissable à son aspect gras, clair, transparent tirant vers le vert. Elle est mordante au goût. La préparation des bâtons à brûler à partir de la sève séchant sur les claies, dont quelques artisans ont le secret à Jérusalem, est particulièrement appréciée par l’occupant romain.
Evêque émérite de Gap et d’Embrun.
Fondateur du groupe de chanteurs "Les Prêtres".
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